Les Américains sont de nouveau la cible de terroristes en Arabie Saoudite. Hier dans la matinée, les activistes saoudiens se sont attaqués au consulat américain de Djeddah qu'ils ont pris sous leurs feux avant de prendre en otage certains de ses employés. Les forces de sécurité, qui ont aussitôt bouclé les alentours du consulat ont donné l'assaut au bout de quelques heures tuant trois membres du commando, blessant et arrêtant deux autres, selon un communiqué du ministère saoudien de l'Intérieur. L'identité du groupe terroriste n'a pas été révélée. Le communiqué officiel s'est seulement borné à parler d'un « groupe de la minorité des égarés », sans autre précision. Les autorités saoudiennes désignent à travers ce qualificatif, les activistes islamistes qui sont derrière les attentats qui secouent le pays. Il y a comme une fausse pudeur politique de la part des autorités saoudiennes à nommer les choses par leur nom pour ne pas irriter et se mettre à dos le courant religieux wahhabite très influent dans le royaume. L'assaut des forces de sécurité saoudiennes n'a fait aucune victime parmi le personnel diplomatique américain, selon les sources diplomatiques américaines. Seuls deux agents non-américains de la mission diplomatique ont été blessés au cours des échanges de tirs entre les forces de sécurité et les preneurs d'otages. « Tous les Américains sont en sécurité et ont été localisés », a déclaré hier après le dénouement de la prise d'otages la porte-parole du consulat américain, ajoutant que « les autorités américaines essayaient désormais de s'assurer que les autres Américains vivant dans cette ville étaient également à l'abri ». Les attaques contre les intérêts américains ne se comptent plus depuis la première attaque meurtrière qui avait ciblé, en 1996, un convoi militaire à Dahrane, dans le nord du pays. Le sentiment antiaméricain s'est développé encore davantage depuis la première guerre du Golfe. Une grande partie de l'opinion publique et notamment les milieux les plus conservateurs ont mal apprécié la présence des forces de la coalition et des non-musulmans en Arabie Saoudite, terre d'Islam. Ces milieux n'ont jamais pardonné aux autorités saoudiennes leur duplicité et la profanation des lieux saints de l'Islam. La riposte ne s'était pas faite attendre pour montrer aux Américains qu'ils n'étaient pas les bienvenus. Des opérations audacieuses au regard des objectifs visés sont régulièrement enregistrées. Les cibles sont minutieusement choisies, comme l'attaque qui avait visé en mai dernier le complexe pétrolier de Khobar dans le nord du pays. Une attaque qui s'était terminée par un bain de sang et un lourd bilan : 22 personnes tuées, dont 19 étrangères. Les opérations commandos menées par les groupes terroristes contre des intérêts occidentaux et américains sont passées depuis quelques mois à une autre phase opérationnelle caractérisée par la stratégie des enlèvements de ressortissants étrangers qui semble faire recette. Cette méthode largement expérimentée par le groupe de Mossad Al Zaaqaoui en Irak inspire de plus en plus les activistes saoudiens. Les experts n'écartent d'ailleurs pas l'idée selon laquelle les attentats commis en Arabie Saoudite obéissent à la même chaîne de commandement menant à Al Qaîda. L'assassinat, en juin dernier, d'un ressortissant américain travaillant pour la société américaine de fabrication des hélicoptères Apache, avait conduit les autorités américaines à renouveler leur appel aux 30 000 ressortissants américains présents en Arabie Saoudite pour quitter le royaume. La décapitation de cet ingénieur américain dont la cassette avait été diffusée par la chaîne Al Djazira avait montré aux autorités américaines, qu'ils avaient affaire à des activistes déterminés. Cet acte terroriste avait été revendiqué par la « cellule d'Al Qaîda dans la péninsule arabique » à travers son site Internet. Ce groupe avait menacé de « nettoyer la péninsule arabique des mécréants ». Si aucune information n'avait filtré hier sur l'identité et les motivations des preneurs d'otages, la piste d'Al Qaîda s'impose à l'évidence aux enquêteurs. Les autorités saoudiennes avaient annoncé avec grand fracas en juin dernier la mort au cours d'un accrochage avec les forces de sécurité du chef du « réseau Al Qaîda pour la péninsule arabique », Abdel Aziz Al Mouqrin qualifiant cette prise de « coup majeur porté à Al Qaîda en Arabie Saoudite ». La disparition de ce chef terroriste qui avait été confirmée par « la cellule d'Al Qaîda de la péninsule arabique » n'a pas eu pour autant de conséquences majeures sur l'éradication du mouvement. Les autorités saoudiennes qui avaient fait du tout sécuritaire le fondement de leur lutte contre le terrorisme ont lancé depuis quelques mois, des appels au repentir à l'adresse des « égarés » avec l'engagement de l'Etat de faire bénéficier ceux qui déposeraient les armes de mesures de clémence. L'appel ne semble pas avoir été entendu. L'attaque d'hier se veut un message destiné à la fois aux autorités saoudiennes et aux Américains. Il reste que l'objectif du groupe terroriste qui opère en Arabie Saoudite - si tant est qu'il s'agit réellement d'un seul et même groupe homogène-, s'il a réussi à porter des coups durs à leurs adversaires, il n'aura pas réussi, en revanche, à soulever la population et à la rallier à leur appel au djihad.