C'est en vainqueur que Bouguerra Soltani a animé hier sa conférence de presse à Alger, en présence des nouveaux membres de la direction du Mouvement pour la société et la paix (MSP). Pour la première fois, Bouguerra est apparu virulent à l'égard de ses adversaires qui, a-t-il déclaré, « menaçaient » de lui « mettre les menottes aux mains lors du congrès ». Avant même que les journalistes se lancent dans les questions, le président du MSP a tenu à mettre « les points sur les ‘‘i'' et les barres sur les t ». « La sortie des cabinets vers le terrain ne sera plus un slogan, mais une réalité parce que les enfants du MSP ne veulent plus des cabinards et de makhzen, mais des gens qui vont vers la base », a-t-il déclaré avant de revenir sur la tenue du congrès résumée en dix points. « Le compteur désormais remis à zéro » Pour lui, les congressistes ont adopté la logique qui consiste « à essuyer tout ce qui a été mis sur la table », expliquant que ses adversaires ont utilisé tous les moyens pour le détruire, citant par exemple « leur recours au mouvement des frères musulmans, à la famille de feu Mahfoud Nahnah, à la peur, aux scénarios d'affaires de corruption, mais le congrès de la Coupole a donné naissance à un aigle. Les congressistes ont fait tomber toutes les décisions qu'ils avaient prises. Le message qu'ils ont voulu leur adresser est celui de rejeter tout ce qu'ils avaient préparé. C'est le congrès qui a fait tomber la candidature du makhzen. Nous voulions un congrès souverain et c'est ce qui a été fait ». Pour Bouguerra Soltani, ces assises n'ont duré en réalité qu'une journée et demie durant laquelle « il y a eu une véritable opération chirurgicale et où il fallait préparer une salle de réanimation pour permettre au MSP de vivre plus longtemps, et il vivra longtemps pour être dans un avenir proche ou lointain un leader comme l'a rêvé Mahfoud Nahnah ». Le premier responsable du MSP a affirmé « avoir remis le compteur à zéro » et déclaré que la situation n'a pas été débloquée grâce au prêche du vendredi dernier. « Ne nous transformez pas en nains, car si c'était grâce à ce prêche que le congrès a repris son cours, nous aurions réuni tout le monde dans une mosquée et le problème aurait été réglé. Les pressions qu'a subies le président du bureau du congrès, M. Gadouda, ont été plus fortes entre 14h et 22h (après ce prêche) », a-t-il noté, précisant que devant le congrès aucune autre institution du parti n'a de poids. « Nous avons tenu à ce que l'échelle des prérogatives soit respectée afin de construire des institutions fortes. » « Plus de parole en dehors des institutions » Bouguerra n'y est pas allé avec le dos de la cuillère et a accusé de lâcheté ceux qui s'expriment anonymement à travers les médias. « La parole en dehors des institutions du parti est finie et ceux qui ne respectent pas cela me trouveront sur leur route », a-t-il menacé. Il a fait savoir à ses adversaires, notamment les 34 membres fondateurs, que le charisme des personnes n'a plus d'effet et sera remplacé par celui des institutions. « Les fondateurs du parti, que nous respectons, n'ont pas le statut de tuteurs du mouvement. Ils sont membres du madjlis echoura (conseil consultatif) au même titre que les autres membres », a-t-il souligné. Il leur a expliqué que c'est grâce à « la clémence » de certains congressistes que le statut de membre d'office au sein du conseil consultatif a été maintenu et ce « par respect à la volonté de feu Nahnah qui a eu l'idée de leur donner cette qualité ». De ce fait, Bouguerra Soltani a averti qu'il n'acceptera plus la culture d'appareil qui a nui au mouvement, estimant que le congrès était en fait « un référendum sur son autodétermination. Le tutorat a été enlevé et les épidémies enterrées dans cette Coupole. La majorité du congrès a imposé le retrait et donné à chacun son véritable poids ». « DEs prolongements idéologiques sur le plan international » Pour mieux expliquer cette analyse, Bouguerra a déclaré : « Le congrès a retiré son droit à l'élection à majorité du président. Gadouda, président du bureau, a été le coordinateur entre le congrès et la commission lors de la bataille de l'examen des articles à amender. Toutes les propositions de la commission sont tombées. » Le président du MSP a regretté que « ceux qui tenaient le congrès en otage n'avaient que deux voix. C'est une honte ». Bouguerra est revenu sur le troisième congrès tenu en 2003 lorsqu'il avait comme adversaire Saïdani, actuellement président du conseil consultatif. « Il avait à peine 10 voix de moins que moi. Il était le plus habilité à provoquer la scission au sein du parti. Mais il ne l'a pas fait. Il a accepté le jeu et s'est retiré dignement. Mais je le redis, le retrait (ndlr, Menasra) n'a pas été un facteur de réussite du congrès (...). Ceux qui voulaient lui mettre les menottes aux mains ont été écartés. » Il a averti, en outre, qu'il n'acceptera plus dans les rangs quatre catégories de militants : ceux qui se sont coupés de leurs wilayas, auxquels il exigera des visas, ceux qui s'expriment en dehors des institutions du parti, contre lesquels il annonce de sévères sanctions, ceux qui individualisent les victoires, et enfin ceux qui militent par correspondance. Interrogé sur sa manière de se consacrer uniquement aux affaires du parti, Bouguerra Soltani a réaffirmé sa promesse, tout en se refusant à donner plus de détails, estimant qu'il y a « des choses à ne pas dire maintenant ». Bouguerra Soltani a refusé, par ailleurs, de parler de « règlement de comptes » avec ses adversaires, en disant qu'« il est temps que chacun apprenne à connaître la place qui lui est due ». A la question de la relation du parti avec le mouvement des frères musulmans, le conférencier a déclaré : « Le MSP est un parti indépendant, mais qui a des prolongements idéologiques sur le plan international. Nous n'avons aucun complexe à le dire. Nous avons à apprendre des autres, ceux qui condamnent la violence et le terrorisme et savent construire. Je peux vous affirmer que le mourchid (le guide) des frères musulmans nous a adressé un message fort de soutien et de félicitations. » Pour ce qui est de l'avenir de ses adversaires, Bouguerra a estimé qu'il est le président d'un mouvement et non de personnes. « Il n' y aura pas de règlements de comptes. Toutes les instances du parti ont été dissoutes et le parti est actuellement en situation de statu quo jusqu'à ce qu'elles soient renouvelées », a-t-il conclu.