De la région des Ouadhias (Tizi Ouzou), réputée pour avoir produit la première robe kabyle il y a plusieurs décennies, la robe kabyle commence, selon les professionnels, à se faire une place sur le marché national du prêt-à-porter. L'activisme des associations, comme celle de Tizi Hibel (Béni Douala), conjuguée à la tendance créative des couturières, a donné un élan commercial considérable au produit. Naâr Houria, couturière, modéliste-styliste, installée à Béni Douala, affirme : « Le port de la robe kabyle a atteint plusieurs régions du pays. Elle est devenue inévitable dans le trousseau de la mariée. Des clients d'Alger et d'Oran viennent régulièrement s'approvisionner dans mon petit atelier. » En Kabylie, notamment dans les villages, la femme ne porte que la tenue kabyle : une longue robe, souvent aux couleurs vives, une fauta assortie et flamboyant d'une série de rayures rouges et jaunes, et un foulard aux différentes couleurs. Grande particularité à Béni Douala, les lycéennes et les enseignantes portent des robes locales au lycée. Les modèles, diffèrent toutefois d'une région à une autre, notamment dans les coupes, les décorations et les motifs si bien que ce sont les mêmes matériaux qui sont utilisés. A Bouzeguène, par exemple, la passementerie en usage est généralement dorée, cousue en zigzag, alors qu'aux Ouadhias les couleurs rouge et jaune sont prédominantes et la robe surchargée de lanières colorées. « Souvent, les motifs et les formes cousus sur les robes sont l'expression des sentiments et de la sensibilité de la femme, ses espoirs et ses souffrances. La robe, pour elle, est aussi un mode d'expression », dit encore Houria. La production de la robe kabyle a augmenté de manière significative ces dernières années, constatent les couturières et la région de Béni Douala occupe une position dominante. Les fabricants de produits de la passementerie ont également suivi cette tendance. Deux nouvelles fabriques ont vu le jour à Tizi Ouzou, bien qu'une certaine marchandise se fait rare sur le marché local. Le tissu utilisé est la soie, et surtout la popeline, produite dans l'usine de Draâ Ben Khedda. Une robe nécessite un coupon de 4 m de tissu et son coût varie entre 1000 et 6000 DA, selon le tissu et les décorations. La première manifestation consacrée à la robe kabyle s'est tenue l'été dernier à la maison de la culture de Tizi Ouzou, organisée par l'association Fatma n'Soumeur de Tizi Hibel. Lynda Koudache, animatrice de la manifestation, avait émis le souhait de voir instituer une fête de manière régulière et officielle. De nombreuses personnes éprises des produits culturels et artisanaux locaux souhaiteraient un réel développement du port de la robe kabyle. Une manière à la fois de contrecarrer l'arrivée massive des tenues de l'Orient et une préservation d'un patrimoine authentique, profondément amazigh.