Le sommet mondial sur la sécurité alimentaire, qui s'est ouvert hier au siège de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, dans la capitale italienne, se déroule sur fond de polémique, puisque plusieurs organisations non gouvernementales ont tenté malgré le service de l'ordre imposant, déployé à l'occasion, de mener des actions de contestation pour attirer l'attention des leaders du monde sur la gravité de la crise générée par la hausse vertigineuse des prix des denrées alimentaires. Le mouvement associatif pour la défense des droits de l'homme et des consommateurs compte saisir cette opportunité pour critiquer les politiques suivies par les gouvernements qui, selon eux, donnent la priorité aux profits immédiats au détriment du droit à une alimentation correcte des populations. Plusieurs Ong et associations professionnelles qui regroupent les agriculteurs et les pêcheurs ont elles aussi durci la grève qu'ils observent depuis des jours pour protester contre la hausse du prix du carburant. Les pêcheurs italiens, à l'instar de ceux des autres pays européens, laissent leurs chalutiers en rade depuis des jours dans les ports de la péninsule pour protester contre l'augmentation du prix du gasoil. Les représentants de plusieurs Ong, comme Oxfam, Action Aid ou le Forum pour la souveraineté de l'alimentation, ne ménagent pas la direction de la FAO, accusée de dépenser la plus grande part de son budget, soit 80%, pour payer son personnel, plutôt que de le consacrer à l'aide directe aux nécessiteux. Et c'est le président du Sénégal, Abdoulaye Wade, qui jette « la pierre la plus grosse » contre l'agence onusiuenne qu'il a accusée hier de traiter les pays en voie de développement « comme s'ils étaient des mendiants ». Bien que la FAO ait choisi d'axer cette réunion de haut niveau sur le thème des défis que représentent les changements climatiques et les bioénergies, tenus pour responsables de la difficulté d'accès aux ressources vivrières, pour les catégories défavorisées de la population à travers le monde, les participants ont évité de faire du thème de l'éthanol un point central. Des indiscrétions que nous avons recueillies parmi les délégations des pays africains et arabes nous ont révélé que les représentants des pays du Nord ont manœuvré pour parvenir à reléguer la polémique sur les biocarburants au dernier plan. Ce qui explique l'indifférence de l'opinion publique internationale qui assiste impuissante à ce rendez-vous de haut niveau. Il faut dire que lors du dernier sommet de la Fao, en 1996, les décideurs du monde s'étaient engagés à réduire de moitié le nombre des personnes souffrant de faim et de malnutrition. Les mal nourris étaient alors estimés à 800 millions. Aujourd'hui, soit 12 ans après, leur nombre est passé à 862 millions de personnes. L'autre polémique qui a caractérisé ce sommet de la FAO est d'ordre diplomatique, car la visite du président iranien, Mahmoud Ahmadi Nejad, à Rome n'a pas été du goût de certains, alors que d'autres se disent « outrés » par la visite du président du Zimbabwe, Robert Mugabe, que les responsables de l'Union européenne ont déclaré personne non autorisée à séjourner dans leur pays. Et pour ne pas fâcher tout ce beau monde, les responsables italiens ont décidé de faire une entorse exceptionnelle au protocole, en excluant Ahmadi Nejad et Mugabe du dîner officiel donné par Berlusconi dans la prestigieuse villa Madama, en l'honneur des chefs d'Etat présents au sommet. La communauté juive d'Italie a observé, hier soir, une protestation contre la présence du président iranien à Rome, surtout après qu'il ait réitéré ses déclarations hostiles à Israël, affirmant « sa prochaine disparition de la carte du monde ».