La voix des pays les plus touchés par la hausse des prix des denrées alimentaires, car à faible revenu et souffrant de déficit vivrier, s'est élevée au siège de l'agence onusienne, pour dénoncer « l'égoïsme d'un Nord prospère », responsable d'une crise provoquée, en partie, par les fortes subventions agricoles accordées aux agriculteurs des pays riches. Rome (Italie) : De notre correspondante Lorsque c'est le directeur général de l'OMC, Pascal Lamy, qui appelle les gouvernements à « s'attaquer aux problèmes des subventions qui créent des distorsions » au niveau des marchés, car elles accordent ce qu'il appelle « des avantages injustes » à certains pays, c'est qu'il ne s'agit pas d'un sentiment de paranoïa collective ni de « victimisation » de certains responsables africains qui ont laissé s'exprimer lors de cette rencontre internationale leur ras-le-bol. En attendant de trouver un consensus autour du contenu de la déclaration finale qui sera adoptée aujourd'hui à la conclusion du sommet mondial sur la sécurité alimentaire organisé par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, les intervenants, notamment ceux qui représentent les pays en voie de développement, ont mis l'accent sur l'urgence d'ouvrir les marchés mondiaux aux exportations de leurs produits agricoles et dénoncé les subventions excessives dont bénéficient les agriculteurs des pays riches. Face à la hausse des prix des denrées alimentaires, qui se maintiendra dans les prochaines dix années, à en croire les prévisions des experts des organisations internationales, seule une plus grande productivité sera à même de fléchir cette tendance alarmante qui menace la sécurité alimentaire des pays les plus dépendants des exportations et compromet même leur stabilité politique. La FAO, qui estime à 1,7 milliard de dollars l'aide alimentaire qu'il faudra porter avant la fin de 2009 aux pays frappés par le fléau de la faim, ne peut en fournir qu'une infime partie, à peine 17 millions de dollars qui seront distribués sous forme de micro-crédits aux pays africains les plus démunis et leur permettront de promouvoir le secteur agricole. Dans leurs discours, les chefs des Etats africains, comme le Sénégalais Abdulaye Wade ou l'Egyptien Hosni Moubarek, n'ont pas manqué de critiquer les politiques protectionnistes des pays industrialisés qui préfèrent détruire leur surplus de production plutôt que de voir les prix baisser. La polémique autour du biocarburant extrait du maïs ou de la canne à sucre, et que plusieurs organisations non gouvernementales accusent d'être l'une des causes de l'actuelle crise alimentaire, a été étouffée, en quelque sorte, par les pays grands producteurs d'éthanol comme les USA ou le Brésil. Et le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, n'a pu qu'appeler tous les participants à trouver, je cite « le consensus le plus large autour de la question ». C'est dire que les délégations des pays les plus à risques étaient loin d'approuver ce ton conciliant, alors que la crise alimentaire menace à leur porte des centaines de millions de personnes. Le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Saïd Barkat, a plaidé, dans son allocution devant les participants au sommet, pour « la déconnexion transitoire des pays vulnérables du marché mondial ». Se faisant porte-parole des « peuples qui se méfient des mécanismes régissant le commerce international », Barkat émet des doutes sur la prospérité que l'ouverture des marchés pourrait apporter aux populations moins nanties. Le chef de la délégation algérienne a expliqué que « les bouleversements en cours ont montré l'extrême fragilité et la permissivité des zones de grande précarité, qui s'avèrent insuffisamment préparées pour affronter les rigueurs et les dysfonctionnements du marché mondial ». Pour agir sur le continent africain, un protocole d'accord a été signé hier, au siège de la FAO, entre l'Alliance pour une révolution verte en Afrique, et les trois organisations internationales que sont l'Agence onusienne pour l'alimentation et l'agriculture, le Fonds international pour le développement agricole et le Programme mondial pour l'alimentation afin de stimuler la productivité en céréales du continent africain et l'affranchir de la dépendance alimentaire.