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François Fillon. Premier ministre Français, à El Watan et El Khabar : « La France attachée au rôle de l'Algérie au sein de l'UPM »
Publié dans El Watan le 21 - 06 - 2008

C'est un agenda chargé qui attend lepremier ministre français lors de sa venue aujourd'hui à Alger. En effet, François Fillon procédera, avec son homologue algérien Abdelaziz Belkhadem, à la signature de deux accords de coopération dans le domaine du nucléaire civil et du militaire. Il prononcera un discours à l'Ecole supérieure algérienne des affaires (ESAA, école algéro-française). Il visitera la basilique de Notre-Dame-d'Afrique et rencontrera des représentants de la communauté française établie en Algérie. Il sera reçu par le président Abdelaziz Bouteflika. Outre la coopération, la question de la participation algérienne au sommet fondateur de l'union pour la Méditerranée (UPM) sera abordée lors de ces entretiens. Dans l'interview accordée à El Watan et El Khabar, François Fillon estime que la France attache beaucoup de prix au rôle de l'Algérie, qualifiée de partenaire régional majeur, au sein de l'UPM. Si la relation économique entre les deux pays est « exceptionnelle », la position de la France n'est, selon lui, pas acquise.
A ses yeux, les 300 entreprises françaises présentes en Algérie peuvent faire plus en matière d'investissement. Au volet sécuritaire, il note qu'il n'est pas question de céder à la menace, après l'attentat qui a ciblé le groupe français Razel. « Les entreprises doivent rester en Algérie », déclare-t-il. Les services de sécurité des deux pays ont une bonne coopération technique. L'assistance et la formation seront les principaux points de l'accord nucléaire entre les pays (accord avalisé par l'agence européenne Euratom). A propos de l'histoire, François Fillon estime que la France a beaucoup avancé dans les questions mémorielles. « Cette reconnaissance des fautes passées, nous la devions aux Algériens qui ont souffert du système colonial (...), car chaque démocratie est fondée sur une exigence de vérité », dit-il. Le Premier ministre français a évité de répondre à une question sur la possibilité de vente d'armes françaises à l'Algérie.
Monsieur le Premier ministre, ces dernières semaines, plusieurs ministres français, dont le chef de la diplomatie, Bernard Kouchner, ont visité l'Algérie. Est-ce le signe d'une coopération qui se renforce entre les deux pays ou plutôt l'expression d'un certain malaise ? Et quelle évaluation faites-vous des relations bilatérales une année après l'arrivée de M. Sarkozy au pouvoir ?
C'est bien le signe que nous souhaitons construire avec l'Algérie une relation durable, confiante, d'exception. Ma visite est la première d'un chef de gouvernement français depuis 1986. Ce n'est pas un hasard. Elle vient clore en effet un cycle de visites bilatérales très intense, et je peux vous le dire, unique. Je remercie les autorités algériennes, le président Bouteflika, mais aussi le chef du gouvernement, M. Belkhadem, pour l'accueil tout à fait exceptionnel qu'ils ont réservé à chacun des membres du gouvernement. Ces visites se sont traduites par des signatures d'accord, comme lors de la visite de Michèle Alliot-Marie, sur la protection civile, ou de M. Djoudi à Paris qui a permis de mettre un terme au contentieux sur les assurances. Les échanges qu'a eus Jean-Louis Borloo avec Chakib Khelil et Cherif Rahmani ont été de grande valeur pour nous, car nous estimons être confrontés aux mêmes défis. Nous avons besoin de l'Algérie pour les relever, comme je crois que l'Algérie a besoin de la France. Anne-Marie Idrac est récemment venue pour encourager les entreprises françaises dans leurs investissements ici à l'occasion de la Foire internationale d'Alger, et Fadela Amara a pu discuter de l'expérience algérienne en matière d'urbanisme et d'habitat, au-delà je sais de la fierté qu'elle avait à revenir sur une terre à laquelle elle est attachée. Après la visite d'Etat du président de la République, qui a redynamisé notre relation, je souhaite aujourd'hui redire aux autorités algériennes qu'elles peuvent compter sur la France. Oui, la France et l'Algérie ont un avenir commun. Elles doivent se tourner vers l'avenir, en faisant les efforts nécessaires de part et d'autre pour regarder le passé en face. Le président de la République a reconnu le caractère injuste du système colonial ainsi que les souffrances qu'il a engendrées. L'ambassadeur Bajolet a, au nom des autorités françaises, reconnu la responsabilité de la France dans les massacres du 8 mai 1945.
Les investissements directs français en Algérie sont toujours faibles par rapport aux échanges commerciaux (la France est le premier fournisseur de l'Algérie). A quoi est dû cette réticence ou ce manque d'audace ? Sont-ils liés au « risque pays » ? A la bureaucratie ? Ou existe-t-il d'autres raisons qui bloquent l'engagement des investisseurs français ?
Je tiens à saluer les entreprises françaises qui font le choix de l'Algérie : plus de 300 entreprises, parmi les plus grandes, sont présentes et investissent beaucoup en Algérie : entre 200 et 300 millions d'euros par an ! Elles ont permis la création de près de 30 000 emplois directs, et leur engagement nous permet d'être aujourd'hui le premier investisseur hors hydrocarbures et le premier partenaire commercial de l'Algérie. Concrètement, cela veut dire que les entreprises françaises profitent aux travailleurs et aux consommateurs algériens. Mais nous pourrions faire plus et mieux encore. Le développement de nos relations économiques passe par les PME qui créent ici de l'emploi et des richesses. Nous devons reconnaître certaines difficultés que rencontrent aussi les entreprises françaises pour venir s'installer en Algérie. L'accès au foncier est complexe, c'est vrai. Il y a certainement des lourdeurs administratives — nous les réduisons nous-mêmes en France ! Les entreprises, et les PME particulièrement, ont des choses à nous apprendre en la matière. Ecoutons-les.
La France craint-elle la forte concurrence des pays asiatiques et arabes en Algérie et au Maghreb ? Ou est-on convaincu, à Paris, que la France a une longueur d'avance sur les autres concurrents dans la région, et donc il n'y a pas lieu de s'inquiéter ?
Notre relation économique est exceptionnelle, mais nous avons pleinement conscience que notre position n'est pas acquise. L'Algérie est un pays indépendant, qui décide librement et nous respectons ses décisions. Dans ce contexte, les entreprises françaises partent à égalité avec les autres. Mais nous n'avons pas à avoir peur de la concurrence, asiatique ou autre. Nos entreprises ont l'avantage de bien connaître le marché algérien, où elles sont implantées, pour certaines d'entre elles, depuis très longtemps. Elles savent que leur succès dépend de leur adaptation à ce marché, pour lequel la formation technique, notamment, est un élément déterminant. Je n'ai aucun doute sur la volonté des entreprises françaises à conserver la place qu'elles occupent aujourd'hui.
La coopération entre la France et l'Algérie dans le domaine de la sécurité et du renseignement paraît parfaite. C'est du moins ce qu'a déclaré Mme Michelle Alliot-Marie, ministre de l'Intérieur, lors de sa visite en Algérie. Quels sont les principaux points de cette coopération et quelles en sont les perspectives ?
Le développement de notre coopération bilatérale est l'un des piliers du « partenariat d'exception » souhaité par nos deux Présidents. Il s'appuie notamment sur la convention de partenariat signée à l'occasion de la visite d'Etat du président Sarkozy, en décembre 2007. Dans ce texte, qui fixe les grands axes de notre coopération, nous avons introduit un volet sur la coopération dans le domaine de la sécurité, qui est évidemment primordial, pour la France comme pour l'Algérie. Ce cadre juridique a permis de multiplier les initiatives : l'Algérie est aujourd'hui le pays avec lequel la police et la gendarmerie françaises ont le plus d'échanges en termes de coopération technique. Cette coopération répond à deux priorités fixées par les autorités algériennes : le développement de la formation, et la lutte contre le terrorisme et le crime organisé.
Un ingénieur français a été assassiné dernièrement. Des menaces ont été déjà exprimées par des groupes terroristes contre la France. Pensez-vous que les intérêts français sont ciblés en Algérie ? Et pourquoi la France considère l'Algérie comme « un pays dangereux », comme l'a déclaré M. Kouchner ?
Il est exact que des groupes terroristes ont proféré des menaces à plusieurs reprises contre certains pays, dont le nôtre. Nous devons être très vigilants, car nous prenons la sécurité de nos ressortissants et de nos intérêts très au sérieux. Et comme vous le savez, une entreprise française a été frappée à deux reprises au cours des derniers mois. Un ingénieur est décédé lors de la seconde de ces attaques. Il y a donc un certain niveau de danger. Il serait irresponsable de le nier. Mais face au danger, il y a des moyens de se protéger. Les autorités algériennes consacrent des efforts considérables pour protéger les ressortissants et les intérêts français, et je les en remercie. Chacun doit aussi prendre ses précautions.
La situation sécuritaire nécessitera-t-elle le rapatriement des ressortissants français en Algérie ?
Nous ne cédons pas à la menace. Comme je l'ai dit, nous prenons toutes les précautions, mais les entreprises, les ressortissants peuvent et doivent rester en Algérie, et y vivre, aux côtés du peuple algérien. Il n'est pas question de rapatriement.
Un fleuron de la marine française, le Tonnerre, a fait escale début juin à Alger. Les échanges entre les armées des deux pays semblent intenses. Un accord sur la coopération militaire va être signé à la faveur de votre visite. Quelle est la teneur de cet accord ? Existe-t-il une possibilité de vente d'armes à l'Algérie dans les prochaines années ?
Depuis 2003, les relations dans le domaine de la défense se sont effectivement étoffées. Cela s'est traduit en particulier par la réalisation d'exercices entre les forces navales de nos deux pays qui ont lieu tous les ans et qui permettent à nos forces de mieux se connaître et de mettre en place des procédures communes afin de répondre aux différentes menaces qui pourraient voir le jour en Méditerranée. L'accord de coopération dans le domaine de la défense qui va être signé lors de ma visite permettra à nos forces de se rapprocher et de réaliser des activités dans le domaine de la formation, de la santé militaire. Il permettra également l'échange de vues en matière de défense et de doctrine d'emploi. Il offrira enfin la possibilité de développer des programmes de formation pour les militaires algériens. C'est une ère nouvelle, ambitieuse et prometteuse qui s'ouvre.
L'Algérie et la France vont signer un accord de coopération dans le domaine du nucléaire civil. Comment cette coopération va-t-elle s'exprimer ? Et pourquoi la France insiste sur la nécessité de développer l'énergie nucléaire, ce qui tranche avec la position réservée d'autres Etats du Nord ?
Vous avez raison de souligner l'importance de cet accord de coopération pour le développement et les utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire, qui doit être signé pendant ma visite. Cet accord vise à aider l'Algérie à mettre en place le cadre et les infrastructures nécessaires au développement de l'énergie nucléaire civile. Il s'agit d'une coopération de long terme, car les choses ne s'improvisent pas dans ce domaine. Avant d'envisager la mise en place d'un programme électronucléaire proprement dit, notre coopération prendra d'abord la forme d'une assistance technique dans les domaines de la formation, de la recherche, de la réglementation... Comme vous le savez, il y a partout dans le monde une demande croissante vis-à-vis de l'énergie nucléaire. La France, qui dispose d'une expertise reconnue dans ce domaine, est prête à répondre à ces demandes, en particulier en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. La France n'a pas de réticence de principe vis-à-vis de l'accès de ces pays à l'énergie nucléaire civile, contrairement à ce que l'Iran voudrait faire croire, à condition qu'ils respectent leurs engagements en matière de non-prolifération au titre du Traité de non-prolifération. L'ensemble des coopérations que nous menons dans le domaine du nucléaire civil se font dans le strict respect des normes les plus exigeantes de sûreté, de sécurité et de non-prolifération, et ce sera bien sûr le cas avec l'Algérie.
L'Europe est préoccupée par sa sécurité énergétique avec la hausse des cours mondiaux. Comment l'Algérie, qui figure parmi les principaux fournisseurs du continent en gaz naturel, pourra-t-elle contribuer à cette sécurité ?
Nous sommes favorables à des contrats à moyen et long termes qui sécurisent à la fois le producteur et le consommateur. C'est d'ailleurs la logique d'une relation stratégique entre l'Algérie et la France, et au-delà, l'Europe. Je sais que ce point de vue n'est pas toujours partagé. Mais je sais aussi que nos relations avec l'Algérie sont trop importantes pour que nous ne trouvions pas d'entente qui permette de satisfaire nos besoins en énergie, d'un côté, et les intérêts de l'Algérie, de l'autre. D'ailleurs, la prochaine présidence française de l'Union européenne consacrera une part importante de ses travaux à la question énergétique et aux rapports de l'UE avec les pays qui nous fournissent des hydrocarbures. Parallèlement, nous devons engager un dialogue constructif au sein des instances ad hoc que sont le Forum international de l'énergie et le Forum des pays exportateurs de gaz.
L'Algérie a exprimé des réserves sur l'union pour la Méditerranée (UPM) et a même évoqué des « aspects obscurs » liés à ce projet. Quels seront éventuellement les arguments que vous allez avancer pour convaincre le président Abdelaziz Bouteflika de participer au sommet fondateur de l'UPM du 13 juillet 2008 ? Si jamais l'Algérie refuse d'y adhérer, le projet aura-t-il des chances de réussir ?
L'Algérie montre depuis le départ un grand intérêt pour ce projet. Nous avons tenu à l'associer étroitement à la réflexion, tout au long de la mise en forme du projet, et elle y a d'ailleurs contribué très utilement. Elle nous a fait part d'un certain nombre d'interrogations et de remarques, en particulier sur le contenu et le format des projets, dont nous avons tenu compte et dont la commission européenne a tenu compte dans ses propositions. La France attache évidemment beaucoup de prix au rôle de l'Algérie au sein de l'UPM. Il nous semble indispensable qu'un partenaire régional majeur comme l'Algérie puisse participer pleinement au lancement et à la mise en œuvre de ce projet ambitieux. Le président de la République a eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises au président Bouteflika, lors de sa visite de travail en juillet 2007, puis lors de sa visite d'Etat en décembre dernier.
Le président français Nicolas Sarkozy a qualifié le système colonial d'injuste et l'ambassadeur de France à Alger a évoqué les massacres commis en mai 1945, mais cela reste pour les Algériens insuffisant, peut-on s'attendre à une évolution dans ce dossier ? Qu'est-ce qui empêche la France de reconnaître sa responsabilité dans ce qui a été commis durant la colonisation ?
La France a depuis quelques mois, quelques années même, beaucoup avancé sur les questions mémorielles. Cette reconnaissance des fautes passées, nous la devions aux Algériens qui ont souffert du système colonial, nous nous la devions aussi à nous-mêmes, car chaque démocratie est fondée sur une exigence de vérité. Oui, la France va continuer sur cette voie, ce qui requiert du courage politique. Il est nécessaire que les responsables politiques ouvrent maintenant plus largement la voie aux chercheurs et aux historiens, en suscitant un travail conjoint d'écriture de l'histoire. Déjà, nous sommes en train de progresser sur un certain nombre de dossiers concrets, en dépit parfois des résistances. Nous avons ainsi proposé la création d'un groupe de travail sur les archives. J'ajoute que les documents français antérieurs à 1948 sont déjà du domaine public et qu'un projet de loi en cours d'examen prévoit de ramener le délai spécial de communicabilité à 50 ans. Les Algériens ont un droit légitime d'accès à la connaissance de leur propre histoire. Nous avons récemment fait don de tous nos documents audiovisuels possédés par l'INA. Sur un autre dossier, celui des mines, nous avons donné les plans des engins déposés en son temps par la France. J'ai constaté que sur ces dossiers, parfois d'une grande sensibilité, dès que le dialogue était noué, les esprits commençaient à s'apaiser et chacun travaillait dans le souci d'établir la vérité, par respect pour toutes les victimes. En ce qui concerne la responsabilité de la France dans ce qui a été commis, en particulier durant la guerre d'Algérie, nous l'avons reconnue et nous continuons de la reconnaître, sans réserve. Les déclarations du président de la République et de notre ambassadeur à Alger que vous mentionnez en témoignent. Il s'agit d'une démarche qui doit être partagée et qui appelle à un certain courage de part et d'autre, s'agissant d'une histoire qui touche personnellement tant d'entre nous. Nos deux peuples sont en droit d'attendre de notre part cet effort, car la France et l'Algérie ont un partenariat d'exception à bâtir. Mon souhait est que l'Algérie voie aujourd'hui en la France son amie la plus proche et celle qui la comprend.
Il est question de créer un groupe de travail mixte pour élaborer une carte des sites contaminés par les essais nucléaires des années 1960 dans le Sud algérien. Ce groupe a-t-il été créé ? Et est-ce qu'il y a possibilité que les victimes des opérations « Gerboise » soient indemnisées ?
Comme vous le savez, la France a réalisé une série d'essais nucléaires dans le Sahara algérien entre 1960 et 1966 et les autorités algériennes nous ont demandé de les aider à déterminer le degré de contamination actuel des sites et à les décontaminer, si cela s'avérait nécessaire, compte tenu des projets de développement en cours dans la région. Lors de sa visite d'Etat en Algérie en décembre 2007, le président de la République a dit très clairement au président Bouteflika que nous étions disposés à examiner les demandes algériennes de coopération sur cette question, dans un esprit d'ouverture et de transparence et loin de toute polémique. Je peux vous dire que ces engagements seront tenus. Nous sommes en contact étroit avec nos partenaires algériens à ce sujet, et compte tenu de la volonté qui existe de part et d'autre, je ne doute pas que nous aboutissions.
La France entend amener l'Union européenne à adopter un pacte commun sur les migrations. Pourquoi ce pacte ? Aura-t-il des incidences sur la libre circulation des personnes ? N'avez-vous pas l'impression que l'Europe, un continent aux prises à une crise démographique et à une pénurie de talents, se renferme de plus en plus aux flux migratoires ?
A travers ce pacte européen, il s'agit de jeter les premiers jalons d'une politique européenne de l'immigration et aussi d'aller vers une harmonisation des conditions d'accès au statut de réfugié entre les différents Etats membres. La liberté de circuler à l'intérieur de l'Union européenne constitue entre les 24 pays de l'espace Schengen une réalité vivante et un formidable moyen d'échange. Les ressortissants algériens qui pénètrent dans cet espace Schengen munis d'un visa sont bien sûr également bénéficiaires de cette liberté de circulation.En ce qui concerne les flux migratoires et contrairement aux idées reçues, l'Europe accueille davantage de migrants que l'Amérique du Nord et en accueille aussi bien davantage depuis le début du XXIe siècle que par le passé. Il nous faut toutefois, entre Européens, harmoniser notre politique migratoire, en ayant bien conscience qu'il est préférable d'accueillir des personnes à la fois capables et désireuses de s'intégrer rapidement sur le marché du travail et d'adhérer pleinement à l'identité européenne et aux valeurs qui sont les nôtres, qu'il s'agisse par exemple de la démocratie, de l'égalité entre hommes et femmes et de la tolérance. L'Algérie, comme l'Afrique, est riche de sa jeunesse. Les pays européens ne peuvent en dire autant. C'est pourquoi il me semble que nous avons des intérêts communs et qu'il est possible de trouver un terrain d'entente, entre responsables français et algériens, sur ce sujet des questions migratoires et de circulation. Il est important que nous parlions ensemble de nos attentes et de ce que chacun peut envisager à l'avenir. Côté français, notre vision aujourd'hui des questions migratoires est qu'il convient de favoriser la circulation des professionnels afin de leur permettre de parfaire leur formation en France et d'y acquérir une première expérience dont ils peuvent ensuite faire profiter leur pays d'origine. Il me semble que cela correspond bien aux attentes de très nombreux Algériens.
Bio-Express
Diplômé en droit public, François Fillon, 54 ans, a été plusieurs fois ministre (éducation, affaires sociales, poste et télécommunications, enseignement supérieur...) entre 1995 et 2005. Au RPR (remplacé depuis par le Mouvement pour la France, UMP, droite), il a occupé les postes de secrétaire national chargé des fédérations et conseiller politique entre 1997 et 2001. Entre 2004 et 2007, il a été nommé conseiller politique du président de l'UMP, Nicolas Sarkozy, qui, une fois élu en mai 2007, l'a choisi pour être son Premier ministre. Avant d'être élu député de la Sarthe en juin 2007, François Fillon a occupé plusieurs fonctions électives depuis 1981 : président du conseil régional des pays de la Loire, président du conseil général de la Sarthe, président de la communauté de communes de Sablé-sur-Sarthe... En 2006, il a publié chez Albin Michel La France peut supporter la vérité. Grand amateur d'automobile, il est membre du comité de direction des 24 heures du Mans (Formule 1). Marié avec Pénélope Clarke, François Fillon est père de cinq enfants.


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