Perchée sur une colline mais coincée entre deux autres, la ville nouvelle de Sidi Abdellah ne s'offre qu'aux visiteurs égarés. Loin de la capitale algéroise et de ses tumultes incessants, la ville nouvelle offre une architecture moderne dans une ambiance campagnarde. La température au sol semble s'élever dans le coin et la bise citadine chargée de Co2 est complètement absente du site. Des immeubles couleur terre se distinguent de loin sur la route ascendante et donnent une impression de mirage. Les couleurs frappantes du linge étendu au balcon ne sont pas visibles de la route qui s'égare à Sidi Abdellah. Une route plus qu'un chemin qui mène à la ville nouvelle et qui danse parmi des virages serrés et dangereux. Dans une espèce de ravin, à gauche puis à droite, la route conduit vers un méandre de paysages vallonnés et quasiment secs. On se laisse guider jusqu'aux portes de la ville annoncée par une ouverture majestueuse et architecturale. Des immeubles aux fenêtres étroites et aux balcons imposants s'harmonisent à l'entrée que trois dalles de béton soulignent. Ceinturant la ville sans la quadriller, les immeubles délimitent la ville sans pour autant y poser des frontières. Apposés sur la colline, ils se dressent sur toute leur hauteur permettant à l'œil le loisir de s'introduire dans la ville sans avoir à se déplacer. Sidi Abdellah, nichée sur une colline, respecte les horizons et épouse dans sa forme les vallons avoisinants. Dans son immense allée introductive mais que l'absence de soins désarticule, un petit lac disposé en contrebas surprend le regard aguerri d'herbes sèches. Des familles, les premiers individus à apparaître dans cette nature morte, profitent des joies de l'étang en pique-niquant. Savamment travaillé, le lac artificiel a des contours qui permettent à certains de s'isoler et à d'autres de s'introduire. Un petit pont enjambe les deux rives dans une ballade romantique. Tout y a été pensé… La clause environnementale On s'en souvient, l'agglomération qui se situe entre Mitidja et le littoral devait constituer un grand pôle urbanistique. Quelque 30 000 logements et équipements scolaires, sanitaires et culturels y étaient prévus et tout cela découpé dans un tissu urbain réfléchi. 23 quartiers devaient composer l'agglomération tout en respectant les reliefs topographiques. Car tout l'intérêt de la ville nouvelle de Sidi Abdellah réside dans le fait de marier agglomération et agriculture. En effet, préserver pour exploiter les terres à fort potentiel agricole et maintenir le cachet rural consistait la pierre angulaire de tout le projet. Dans l'enceinte de la ville, les constructions sont entièrement habitées. Parfaitement juxtaposées les unes à côté des autres, les bâtisses sont reliées par un système de passerelles sans pour autant réduire la vue sur le paysage. D'autres constructions sont en cours, plus fermées, étroites et condensées en un seul bloc, fermant les horizons. Petit balcon, petite fenêtre, elles n'offrent pas le même confort que les anciennes. Des poutres romaines sont disposées dans l'encadrement des fenêtres jurant avec le décor et insultant les lieux. Deux sites se distinguent à Sidi Abdellah : l'ancien et le nouveau sans qu'aucun n'ait de ressemblance avec le précédent. Il est vrai que le projet devait bénéficier depuis l'année dernière d'un nouveau souffle avec la nécessité d'y créer un cyberpark et un grand complexe immobilier devant désengorger la capitale. Pourtant au lancement du projet de la ville nouvelle, une charte environnementale et culturelle de la ville de Sidi Abdellah avait été établie et consistait à chaque constructeur de logements de planter un arbre pour un logement construit et chaque aménageur d'équipement de planter un arbre pour 100 m2 de terrain réservé à l'équipement. « La variété des essences, la répartition entre arbres de hautes tiges et arbustes, entre bosquets, boisements, arbres isolés ou arbres d'alignement, doivent répondre à la logique architecturale du projet », peut-on lire dans la charte. En plus d'une urbanisation nouvelle et incontrôlée, son isolement la contraint à prendre l'aspect sécuritaire au sérieux. A l'extrême partie de la ville, des habitants « prennent » le soleil, kalachnikovs en bandoulière. Le regard interrogateur, et peu scrupuleux au langage, ils observent les montagnes alentours. Pour sortir de la ville et rejoindre la route menant à la Mitidja, un barrage policier clôt le parcours avec un geste d'au-revoir. Appelé par nos soins, le directeur de la ville nouvelle était absent.