Un attentat suicide a fait neuf morts et 100 blessés samedi à Deir Ezzor, une ville de l'est de la Syrie touchée pour la première fois par ce type d'attaque depuis le début de la révolte dans le pays. L'opposition a immédiatement imputé au régime du président Bachar al-Assad "l'entière responsabilité" de cette attaque ainsi que "de tous les attentats criminels" qui ont secoué la Syrie récemment. Le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition a estimé que ces attaques étaient une tentative du régime de "se venger" après avoir échoué à empêcher les Syriens de manifester par dizaines de milliers comme ce fut le cas vendredi. La poursuite des violences a été évoquée par la communauté internationale, toujours impuissante à résoudre le conflit, lors d'un dîner de travail vendredi soir à Camp David (Etats-Unis) entre les dirigeants du G8 dont fait partie Moscou, principal allié de Damas. Samedi matin, selon la télévision officielle syrienne, un "kamikaze terroriste" a fait exploser une voiture piégée à Deir Ezzor avec une tonne d'explosifs. Un groupe d'observateurs de l'ONU, en charge de surveiller la trêve dans le pays, a inspecté le lieu de l'attentat, selon les autorités syriennes. "Les immeubles résidentiels et les installations publiques et privées près du site de l'attentat terroriste ont subi d'importants dégâts" dans le quartier de Massaken Ghazi Ayyach, selon la télévision qui a montré des images d'immeubles détruits, des carcasses de véhicules, un grand cratère et des taches de sang sur une route. L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) a précise de son côté que l'attentat s'était produit dans une rue abritant un siège des renseignements militaires et aériens et un hôpital militaire. Plusieurs attentats meurtriers ont secoué Damas et Alep, deuxième ville du pays, depuis le début de la contestation en mars 2011. Le 10 mai, un double attentat avait fait 55 morts à Damas. La plupart des attaques ont été revendiquées par des groupuscules obscurs, tel le Front al-Nusra. Ailleurs dans le pays, un siège du Baas, parti au pouvoir, a été la cible d'une attaque à la roquette RPG dans la province d'Alep (nord), suivie de combats entre les forces de sécurité et rebelles, selon l'OSDH. Et à Idleb (nord-ouest), des insurgés ont détruit à coups de roquettes RPG un transport de troupes, faisant cinq victimes parmi les soldats, a indiqué l'OSDH sans autre précision. Dans la même région, de violents combats ont éclaté la nuit entre armée et rebelles près de la frontière turque. Dans la province de Homs (centre), un civil a été tué par un tireur embusqué et à Homs, le quartier de Jobar était la cible de tirs de mortiers. Les violences se poursuivent en dépit de la présence de près de 260 observateurs de l'ONU chargés de surveiller la trêve instaurée le 12 avril, en vertu d'un plan de paix de l'émissaire international Kofi Annan, et systématiquement violée. M. Annan se rendra "bientôt" en Syrie, a indiqué son porte-parole. Vendredi, Alep, restée à l'écart aux premiers mois de la révolte, a été le théâtre des "plus importantes manifestations" depuis le début du soulèvement, selon des militants. Les militants tentent désespérément de prendre à témoin les observateurs dont la tâche est encore compliquée par la multiplication des attentats. Le porte-parole de Ban Ki-moon, Martin Nesirky, a déclaré à ce propos que le secrétaire général de l'ONU n'avait pas de "preuve concluante" qu'Al-Qaïda soit à l'origine d'attentats mais craignait que des groupes terroristes ne profitent des troubles. Ban Ki-moon avait estimé jeudi qu'Al-Qaïda pouvait être responsable de récents attentats. Fort du soutien russe, le clan Assad s'accroche plus que jamais au pouvoir, et le règlement de la crise semble de plus en plus éloigné avec les divisions apparues au sein de l'opposition. En 14 mois, plus de 12.000 personnes ont été tuées en Syrie, en majorité des civils, selon l'OSDH. Au Liban voisin, où des combats à Tripoli (nord) entre sunnites anti-Assad et alaouites pro-Assad ont fait dix morts et des dizaines de blessés depuis une semaine, le Premier ministre libanais, Najib Mikati, a critiqué pour la première fois la Syrie. Réagissant à des propos de l'ambassadeur syrien auprès des Nations unies Bachar Jaafari selon qui certaines régions libanaises frontalières sont devenues "un nid de terroristes d'Al-Qaïda", M. Mikati a jugé que de telles accusations "exacerbaient les différences entre les deux pays". Le Liban "assume totalement son devoir de protection des frontières" et dénonce des violations "également côté syrien", a dit M. Mikati, à la tête d'un gouvernement pourtant dominé par le Hezbollah, fervent soutien du régime syrien.