Le procès de l'ancien homme d'affaires algérien Rafik Khalifa, poursuivi pour banqueroute et détournements de fonds, s'est ouvert lundi à Nanterre, près de Paris, en l'absence du principal intéressé emprisonné en Algérie. Le flamboyant fondateur du groupe Khalifa, écroué à Londres depuis 2007, a été extradé vers Alger le 24 décembre 2013. "Les tractations avec l'Algérie n'ont pas abouti: il ne nous a pas été prêté. Ce procès se tiendra donc en son absence", a déclaré la juge Fabienne Siredey-Garnier. Dix autres personnes sont poursuivies, dont son ex-femme Nadia Amirouchen, un notaire, d'anciens représentants de l'entreprise en France ainsi qu'un constructeur et équipementier aéronautique. Ils sont accusés d'avoir, au moment de la déconfiture du groupe en 2003, dissimulé un certain nombre d'actifs, notamment trois avions d'une valeur de 5,5 millions d'euros, une douzaine de voitures de luxe, une villa à Cannes de 35 millions d'euros où l'ancien golden boy organisait de somptueuses réceptions avec de prestigieux invités, parmi lesquels Gérard Depardieu, Catherine Deneuve, Sting ou encore Bono. La défense a demandé, à l'ouverture des débats, "l'extinction de l'action publique", le délai raisonnable étant "largement dépassé dans cette procédure entamée il y a onze ans", selon elle. Au faîte de sa puissance, le groupe Khalifa, employant 20.000 salariés en Algérie et en Europe, était présenté comme la nouvelle vitrine du régime algérien, qui sortait d'une décennie de guerre civile pour s'ouvrir à l'économie de marché. Il proposait aux épargnants algériens de placer leur argent à des taux d'intérêt très attractifs chez Khalifa Bank qui alimentait ensuite le reste du groupe. Mais, en novembre 2002, les opérations de la banque sont gelées à la suite de malversations décelées par Alger. Début 2003, Rafik Khalifa se réfugie à Londres, trois de ses proches collaborateurs sont arrêtés à l'aéroport d'Alger alors qu'ils tentent de fuir avec deux millions d'euros dans une valise et le groupe est placé en liquidation. L'effondrement de cet empire a causé un préjudice estimé entre 1,5 et 5 milliards de dollars à l'Etat algérien et aux épargnants. "Alger ne veut pas d'un grand déballage public à Nanterre sur les circonstances réelles dans lesquelles cette énorme escroquerie, qui a ruiné des milliers de personnes sans qu'aucun contrôle ne soit exercé, a été mise en place", relève la source judiciaire. Le procès doit se tenir jusqu'au 20 juin.