Les libyens ont enterrés, hier matin, dans la ville de Benghazi, 18 personnes tombées sous les balles assassines des forces de sécurité, qui continuaient à tirer sur les manifestant en usant des armes de guerre connues localement sous le nom de « M. T. », alors que le mouvement de révolte contre le colonel Kadhafi, au pouvoir depuis plus de 40 ans, commençait dimanche à toucher Tripoli. La plupart des victimes ont été tuées à Benghazi, deuxième ville du pays à 1.000 km à l'est de Tripoli, mais selon des témoins, des heurts sanglants ont éclaté samedi à Musratha, à 200 km à l'est de la capitale. Benghazi, bastion de l'opposition, est devenu la scène de "massacres", selon un des organisateurs des manifestations, qui s'exprimait sur la chaîne Al-Jazira. "Cela ressemble à une zone de guerre ouverte entre les manifestants et les forces de sécurité". Dans la capitale libyenne, la tension était perceptible dimanche. Des dizaines d'avocats ont participé à un sit-in de protestation contre la répression devant le tribunal, selon des témoins et des sites d'opposition. Ils ont été cernés par des policiers alors que journalistes et passants étaient tenus à l'écart. De nombreux habitants faisaient des courses pour constituer des réserves alimentaires tandis que des commerçants vidaient leurs boutiques, de crainte de manifestations à venir. Des membres des comités révolutionnaires en civil patrouillaient les rues de Tripoli, très peu animées, à bord de voitures parfois sans plaques d'immatriculation, selon d'autres témoins. Des affrontements ont eu lieu par ailleurs dimanche à Zaouia, à 60 km à l'ouest de Tripoli, de mêmes sources. Selon le directeur du bureau de HRW à Londres, Tom Porteous, "au moins 173" personnes ont été tuées depuis mardi. Ce décompte est basé sur des sources hospitalières dans l'est de la Libye, dans quatre villes dont Benghazi, a-t-il ajouté, précisant qu'il s'agissait d'un chiffre incomplet en raison des difficultés de communications. "Nous avons de fortes inquiétudes (...) qu'une catastrophe soit en cours en matière de droits de l'Homme", a-t-il affirmé. Les ulémas libyens exhortent les services de sécurité à arrêter les massacres Cinq ulémas musulmans libyens ont lancé un appel aux forces de sécurité les exhortant à cesser les massacres contre les libyens. Dans le communiqué auquel ont aussi pris part des intellectuels et des chefs de tribus, ils rappellent que « Dieu et son prophète interdisent de tuer des innocents, ne tuez pas vos frères et vos sœurs et arrêtez le carnage maintenant ». Benghazi a été le théâtre, avant-hier samedi, d'un grand carnage lorsque les forces de sécurité ont tiré sur un cortège funèbre, des victimes de jeudi derniers, faisant centaines de morts et des blessés. La ville de Musratha, troisième grande ville de Libye, situés à l'est de la capitale Tripoli, a connue de violents accrochages entre les manifestants et les forces de l'ordre. Selon un témoin, une personne a été tuée et plusieurs autres ont été blessés lorsque des Baltagias (voyous) se sont attaqués aux manifestants à coup de bâtons et de pierres.