SANAA - Des échauffourées avec la police ont fait un mort et une vingtaine de blessés vendredi dans le sud du Yémen, qui a connu une nouvelle journée de forte mobilisation contre le président Ali Abdallah Saleh. Des marches massives à Sanaa, Aden (sud), Taez (sud) et Moukalla (sud-est), ont rassemblé plusieurs centaines de milliers de manifestants, selon les organisateurs, qui ont annoncé le "début de la fin" pour le président Saleh, au pouvoir depuis 32 ans. M. Saleh, un allié des Etats-Unis dans la lutte contre Al-Qaïda, a multiplié en vain les gestes d'apaisement face à une révolte de la rue qui ne se calme pas depuis la fin janvier, dans ce pays pauvre dont les 24 millions d'habitants souffrent d'un fort chômage. Dans la capitale, les organisateurs affirment avoir réuni 100.000 manifestants pour une prière collective devant l'Université de Sanaa où des étudiants campent pour réclamer la chute du régime depuis le début le 27 janvier du mouvement de contestation qui a fait 16 morts à travers le pays. L'imam a affirmé dans son sermon que "la chute du régime était la seule sortie à la situation actuelle". "Pars, pars", ont scandé les manifestants à l'intention du président Saleh. La police s'est contentée de fouiller les gens, après les ordres donnés jeudi par le président Saleh aux forces de sécurité pour protéger ceux qui manifestent pacifiquement. Dans le centre de Sanaa, de nombreux partisans du régime ont également participé à une prière collective à la mémoire des "martyrs du Yémen". A Aden, en dépit des instructions de retenue aux forces de l'ordre, deux défilés ont donné lieu à des affrontements avec la police qui tentait d'empêcher les manifestants de rejoindre une place proche du siège de la sécurité et de plusieurs consulats. Un jeune homme de 17 ans, Mohammed Ahmed Saleh, touché par des tirs est mort à l'hôpital et 20 manifestants ont été blessés, selon des sources médicales. La police a ouvert le feu et fait usage de grenades lacrymogènes contre la première marche, et a dispersé violemment la seconde, selon des témoins et des sources médicales. "Le peuple veut la chute du régime", "mort et honte aux traîtres" et "fidélité aux martyrs", scandaient les manifestants. Treize personnes ont été tuées à Aden depuis le début de la contestation et deux manifestants sont morts à Sanaa et un à Taez. A Taez, une prière a été organisée par les anti-régime et la foule a été estimée par les organisateurs à plusieurs centaines de milliers. Selon des habitants de cette localité, important foyer de la contestation et où un sit-in permanent se poursuit depuis deux semaines, la foule a débordé trois larges boulevards. Une bonne partie des manifestants a ensuite participé aux funérailles d'un protestataire tué la semaine dernière par un jet de grenade attribué aux partisans du régime. A Moukalla, capitale de la province du Hadramout, quelques dizaines de milliers de personnes ont également manifesté pour la chute du régime, selon des sources locales. La police était absente pendant le défilé alors que des partisans du Mouvement séparatiste sudiste s'en sont pris aux manifestants leur reprochant de ne pas appeler à la séparation du sud, qui était un Etat indépendant avant 1990. Dans la province de Saada (nord), des "dizaines de milliers de manifestants" ont aussi défilé contre le président Saleh et en solidarité avec leurs compatriotes dans le reste du pays, ont indiqué les rebelles chiite zaïdites dans un communiqué. "Non à l'oppression, non à la tyrannie" ou "Votre sang, à Sanaa, Taez et Aden, a uni les Yéménites", pouvait-on lire sur des banderoles brandies par les manifestants, affirme le communiqué publié sur le site de la rébellion. Les manifestants ont également appelé le président Saleh à partir, ajoute la rébellion qui a proclamé samedi dernier son soutien à la contestation.