La nouvelle Tunisie de Ghannouchi est confrontée à la montée en puissance de l'extrémisme religieux. Le fléau prend de l'ampleur dans les universités de la violence salafiste, les mosquées de l'intolérance et la scène politique investie par les femmes de Hizb Tahrir, réclamant, lors du conclave organisée dans la banlieue tunisienne, l'instauration du califat. Face aux assurances du grand vainqueur de l'assemblée constituante, le péril de la radicalisation suscite les pires inquiétudes de la présidence, du gouvernement et de l'Assemblée qui ont condamné « l'exacerbation de la violence » contre les individus, les biens et les institutions par des « extrémistes et intégristes ». Le président de la république, Moncef Merzougui a, ainsi, plaidé la nécessité de promulguer « une loi criminalisant l'accusation des gens de mécréance », revendiquée par des partis politiques et des associations des droits de l'homme. C'est aussi le cas l'exécutif qui a exprimé son « rejet catégorique » de l'extrémisme. Dans une déclaration à la presse, le ministre des Affaires religieuses, Nourredine Al-Khademi, a estimé que les mosquées « doivent rester des espaces qui consacrent l'unité nationale et le respect du rite malékite » et « assument un rôle moral et religieux et consacrent l'unité nationale loin de la politique et des intérêts partisans ». A l'épreuve de l'extrémisme religieux, la nouvelle majorité politique est fragilisée par la vague de protestation qui, en dépit des appels au calme, lancé par le gouvernement et des personnalités opposés aux « tentatives d'entraves », a cumulé avec la résurgence de « fortes tensions » survenues entre la puissante confédération syndicale, l'Union générale tunisienne du Travail, et le mouvement Ennadha accusé d'être « l'instigateur » des attaques menées contre les sièges de la centrale syndicale dans plusieurs régions. Le démenti du mouvement islamiste au pouvoir conforte la volonté d'apaisement de Rached Ghannouchi appelant, lors de sa rencontre avec le secrétaire général de l'UGTT, H'cine Abassi, à « promouvoir le dialogue et d'éliminer les facteurs de tensions dans le pays » pour la réalisation des objectifs de « la révolution populaire ». La trêve sociale est conclue. Mais, la gouvernance de la nouvelle Tunisie est plus que jamais en jeu.