Bentiu, la capitale de l'Unité, a été de nouveau bombardée, hier. C'est la première localité d'importance pilonnée par l'aviation soudanaise, depuis juillet dernier, date de la proclamation de l'indépendance du Soudan du Sud. Un Antonov soudanais a largué une bombe sur le marché aux voitures de la capitale de cet Etat frontalier qui regorge de pétrole et théâtre, depuis mardi, de violents affrontements entre les deux voisins. Bilan : cinq morts et six blessés, selon Juba qui rappelle que l'aviation du Nord a lâché jeudi trois bombes sur un pont à Bentiu. Est-ce la promesse de Khartoum de mener une contre-attaque pour reprendre « par tous les moyens » la zone pétrolière contestée de Heglig, une ville stratégique dans l'Etat du Kordofan-Sud occupée par les troupes sud-soudanaises, qui a suscité une réprobation générale dans le monde ? Fort probable. Pour Khartoum, cette zone est « vitale » : elle représente depuis juillet 2011 la majeure partie de sa production de brut. En attendant, Juba affirme qu'elle contrôle toujours Heglig. Ses forces auraient même repoussé, hier, une offensive du Soudan à 42 km d'Heglig. L'état-major de Khartoum a indiqué, vendredi soir, que ses forces marcheront sur Heglig et qu'il rejetait l'offre de Juba. Cette dernière serait prête à évacuer ses forces d'Heglig en cas de déploiement d'une force d'interposition neutre des Nations unies chargée de superviser un cessez-le-feu et le retrait de l'armée soudanaise de la province d'Abyei, voisine de Heglig également revendiquée par les deux pays. Décodée, cette offre signifie que Juba revendique Heglig, initialement contrôlée par Khartoum. L'Union africaine craint la reprise du conflit « catastrophique » entre les deux voisins qui partagent une frontière de plus de 1.800 km. Selon certains analystes, le Nord et le Sud n'ont jamais été si proches d'une guerre totale, depuis l'accord de paix de 2005, qui a mis fin à 22 ans de conflit civil (2 millions de morts). Des témoins cités par des médias locaux et européens font état depuis mardi de « tant de morts ». Le coordinateur humanitaire de l'ONU au Soudan, Ali Al-Za'tari, fait part de sa « profonde inquiétude concernant l'impact sur les civils de la récente escalade ». 10.000 personnes auraient fui les affrontements entre fin mars et début avril, selon le bulletin humanitaire hebdomadaire de l'ONU publié, hier.