Si à Bissau, ce déploiement présenté comme « une réponse au défi croissant de la sécurité dans la région » ne pose pas problème, Manuel Serifo Nhamadjo, l'homme qui a été proposé pour diriger la transition pendant un an, fait le consensus, il n'en est pas de même à Bamako. Le capitaine Amadou Sanogo, qui a renversé le 22 mars dernier le président Amadou Toumani Touré, souhaite reprendre le pouvoir à l'expiration, le 22 mai prochain, du mandat du président par intérim Dioncounda Traoré. « Compte tenu de la situation, il n'y a que Sanogo pour gérer tout cela », déclare Bakary Mariko, le porte-parole du Conseil national pour le redressement de la démocratie et le rétablissement de l'Etat. Et d'ajouter : « Dans l'état actuel des choses, ce n'est pas négociable ». Sanogo qui veut être président du Mali, général, chef suprême des armées, veut négocier avec la CEDEAO et la communauté internationale, sur une seule chose : des moyens de libérer le nord Mali. « Ma priorité, dit-il, c'est le Nord » où Ançar dine, Al-Qaïda au Maghreb islamique et les narcotrafiquants reconvertis émirs ont pris l'ascendant sur le Mouvement national de libération de l'Azawad. Pour lui arracher un compromis sur la présidence et la durée de cette transition, deux médiateurs de la CEDEAO sont à Bamako depuis mardi. En vain. Aux dernières nouvelles, ils s'apprêtaient à quitter le Mali sur un constat d'échec. Le pays, qui est au bord d'un chaos politique et sécuritaire, se retrouvera-t-il après ces quarante jours de discorde, dans une zone de turbulences qui pourrait l'emporter ? Selon certains médias maliens, Traoré, qui a émis le vœu de séjourner au palais présidentiel de Koulouba pendant douze mois pour remettre le pays sur pied, pourrait démissionner avant ce délai constitutionnel. Même si plusieurs associations le pressent de garder le fauteuil présidentiel. Blaise Compaoré, le médiateur de la Cédéao, pourrait « proposer un plan de sortie de crise, qui aurait comme premier objectif de réunir les mouvements armés du nord, le gouvernement de transition, la Cédéao », affirme Djibril Bassolé, son ministre des Affaires étrangères. C'est pour permettre au « Mali de retrouver sa cohésion et relever les grands défis qui touchent à l'intégrité du territoire », dit-il. La Cédéao, qui se dit toujours favorable à l'envoi d'une force, - certains pays, tels la Côte d'Ivoire, ont même avancé les effectifs qu'ils pourraient envoyer, d'autres affirment avoir fort à faire avec leurs rebelles, comme le Tchad - pose deux conditions : l'accord des autorités du pays d'accueil et l'obtention de moyens financiers (380 millions d'euros). Les Etats-Unis qui ont observé un silence inhabituel jusque-là ont exprimé hier leur « profonde inquiétude » sur la détérioration de la situation politique au Mali. « L'ingérence continue de la CNRDRE dans le gouvernement a miné la démocratie au Mali, a conduit à la partition de facto du pays, et a compromis la capacité du pays de répondre à une crise humanitaire dans le nord du Mali », déclare Victoria Nuland, la porte-parole du Département d'Etat américain, pressant Amadou Sanogo et les autres membres de la junte qu'elle tient « directement responsables pour les souffrances croissantes du peuple malien » de démissionner afin de « laisser l'administration intérimaire dirigée par le président Dinoncounda Traore et le Premier ministre Cheick Modibo Diarra gouverner librement et organiser des élections présidentielles le plus rapidement possible ».