« L'Algérie qui partage le renseignement et qui a, de tout temps, prodigué des formations pointues aux forces militaires maliennes, fait preuve de retenue et non de réticence », affirme Soumeylou Boubèye Maiga, l'ex-ministre des Affaires étrangères du Mali (jusqu'au coup d'Etat de mars 2012) et actuel directeur de l'Observatoire du Sahara et du Sahel, dans une conférence qu'il a animée, lundi, midi au siège au siège du quotidien national DK News. Pressé par l'assistance, l'invité de la Fondation algérienne des études stratégiques (ex-Centre de recherche sécuritaire et stratégique) lâchera : « l'Etat algérien est tout à fait disposé à assumer toutes ses responsabilités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ». « Et son leadership ne se limite pas uniquement à l'aspect militaire, il comporte aussi la dimension socio-économique et humanitaire », ajoute-t-il avant de donner son avis sur la crise malienne. « La priorité des priorités pour nous reste la restauration de la souveraineté et de l'autorité de l'Etat malien sur le nord », dit-il. Que faire pour cette souveraineté ? L'ex-ministre de la Défense et ex-directeur des renseignements ne fait pas dans la demi-mesure. Il croit à l'action armée. Même si celle-ci doit être précédée, dit-il, d'un « dialogue avec tous ceux qui se démarquent des groupes terroristes et des narcotrafiquants », et d'une « offre » pour tous « ceux qui ne contestent pas cette souveraineté de rejoindre les rangs de l'intervention militaire ». Souriant à l'idée qu'on ne peut mener une guerre sur 940.000 kilomètres carrés, contre des groupes armés aguerris avec 3.000 soldats de la Cédéao épaulés par une armée malienne décomposée, M. Maiga lance un appel aux partenaires régionaux et extrarégionaux de Bamako. Sur sa lancée, il invite le Cémoc, Comité d'états-majors opérationnel créé en 2009 par les pays du champ (Mali, Niger, Mauritanie, Algérie) à « s'exprimer ». « L'espace dans lequel se passe la menace terroriste correspond à l'espace opérationnel de son état-major », précise-t-il. « Le moment est venu pour l'Algérie de prendre le leadership dans la région et jouer un rôle crucial dans la crise du Mali en nous apportant une aide sous forme de soutien logistique, de formation et de renseignements ». Principale crainte du Malien : l'instrumentalisation de la crise malienne qui n'aurait jamais atteint cette ampleur, au point de constituer une « menace pour la sécurité régionale et internationale », sans la guerre en Libye, et par les Occidentaux et par les djihadistes. « Le Mali se trouve au cœur d'enjeux économiques. Il est situé entre les bassins énergétiques de l'Algérie et du Nigeria. A l'est, il y a les gisements d'uranium au nord du Niger, qui constituent 50% de l'énergie en France, et à l'ouest le bassin de Taoudenni, le sous-sol le plus gorgé d'eau », dit-il avant de mettre en garde contre une forme d'intervention militaire défendue par certains pays. « Elle aurait de très graves répercussions sur tous les pays de la sous-région », prévient-il, et par les djihadistes qui veulent transformer le Mali en une terre du djihad contre tous les Etats de la région. Dire que les revendications des populations de Kidal, Tombouctou, Gao sont, avant le coup d'Etat, purement identitaires et politiques ! A Bamako, des experts internationaux, qui ont achevé lundi leurs travaux entamés le 30 octobre sur le « concept d'opération » de cette intervention, ont passé, hier, le relais aux chefs d'état-major de la Cédéao. Si les chefs d'Etat africains donnent leur accord, il y aura des troupes non-africaines sur le terrain pour aider le Mali à reconquérir son territoire avec les avions français et américains. Durée de cette intervention ? M. Maiga avoue ne rien savoir.