Rencontré à l'occasion du Festival culturel national du théâtre amazigh qui s'est déroulé du dix au dix-huit du mois en cours dans la capitale des Aurès, Batna, le comédien et metteur en scène Djamel Dekkar se confie à nos lecteurs. L'artiste qui plaide pour la professionnalisation du métier de metteur en scène, estime que le théâtre d'expression amazighe a d'ores et déjà tracé son sillon dans le paysage culturel nationale. Suivons-le. Que devient Djamel Dekkar ? Je suis au Théâtre régional de Constantine. Je suis metteur en scène et m'intéresse à tout ce qui se produit dans le domaine du théâtre. La preuve est que je suis au Festival culturel national du théâtre amazigh de Batna. Je suis l'évolution du 4e art. Qu'est-ce que vous avez à nous dire de ce festival qui est à sa 4e édition ? Je dirai qu'il est en bonne voie et qu'il suit une progression ascendante. Je sollicite tout le monde à œuvrer pour son développement et sa pérennisation parce qu'il est notre identité. Il est l'ambassadeur de notre identité, de notre amazighité. Même dans l'Antiquité, le Théâtre amazigh a joué un grand rôle à l'image de la pièce intitulée « L'âne d'or » ou « Les métamorphoses » de Apulée et autres dramaturges. Il paraît que vous êtes contre les pièces théâtrales qui accordent plus d'esthétique à la pièce à présenter qu'au message à véhiculer ? Je n'aime pas ce genre de théâtre, car il accorde plus d'esthétique à la pièce pour nous ébahir, pour nous séduire au détriment du message qu'il véhicule. Je préfère le genre de théâtre qui traite des problèmes de l'heure, d'actualité, des problèmes qui intéressent le public, des sujets qui traitent des préoccupations de l'heure, des problèmes qui se posent aux citoyens. Je ne veux pas que l'esthétique escamote le sujet. Certes des effets spectaculaires sont intéressants, mais pas au détriment du message. Il ne devra pas passer en second plan le sujet. Le théâtre devra se ressaisir. Il est temps. Parce qu'il est en train de dévier de son objectif essentiel et pédagogique : faire passer un message. Le théâtre, dans sa naissance, est social. Il doit parler de la réalité dans laquelle nous vivons. Je ne veux pas du théâtre qui ne véhicule pas de message. Certains disent que ce sont les dramaturges, d'autres par contre renvoient la balle aux metteurs en scène. Où réside le problème ? C'est un faux débat, parce que n'importe qui fait de la mise en scène. Laisse-moi vous dire que la mise en scène est l'orchestration de tous les éléments d'une production théâtrale (jeu, costumes, décor, éclairage, son). C'est un regard subjectif qui se forge d'après une lecture approfondie d'une œuvre. Le travail du metteur en scène commence avant même les répétitions. Il doit avoir analysé de près les intentions de l'auteur, en ayant une connaissance quasi parfaite du texte. Il doit réunir tous les concepteurs et acteurs lors d'une première lecture pour leur faire part de sa vision de l'œuvre, afin que tous puissent intégrer celle-ci à leur travail respectif. Un bon metteur en scène est capable d'exprimer clairement cette vision. Quelle est la recette pour réussir ? Il faut mettre le metteur en scène sur le bon chemin. Il faut qu'il fasse sa véritable mission. Pour réussir des spectacles de qualité qui transmettent des messages, les responsables des théâtres régionaux et des associations théâtrales doivent confier la mise en scène aux véritables metteurs en scène, qui devraient veiller sur tout. Leur rôle est essentiel. Ce sont eux qui impliqueront les acteurs dans le travail purement artistique et pédagogique. Ils doivent prendre des initiatives et respecter les indications de l'auteur ? Certes chacun a son style et sa façon d'envisager son rôle, mais on doit veiller à ne pas tronquer l'œuvre. C'est difficile de devenir metteur en scène de théâtre reconnu dans le milieu de la création artistique. Plus qu'un CV, il faut que les metteurs en scènes jouissent d'une formation, d'un don et d'une longue expérience. Avant de réussir, il faut avoir des capacités réelles et trouver des spectacles à pouvoir monter. Il faut aussi être passionné de lecture de pièces notamment et se rendre autant que possible au théâtre.