« En réponse aux troubles qui enflamment les rues tunisiennes depuis mercredi, jour de l'assassinat de Chokri Belaïd, je présenterai mon cabinet de personnalités compétentes et sans appartenance politique, au plus tard au milieu de la semaine prochaine. Si elle est acceptée, je continuerai à assumer mes fonctions, à défaut, je demanderai au président de chercher un autre candidat pour former un nouveau cabinet », déclare Jebali à l'agence officielle TAP, prenant de court et Ennahda, son parti, et ses deux alliés laïcs. « Tous les ministres seront des indépendants, y compris à l'Intérieur, la Justice et aux Affaires étrangères », précise-t-il à la chaîne France 24 provoquant l'ire de ses détracteurs. Notamment les radicaux d'Ennahda qui refusent de renoncer à ces ministères clés. « Quelle alternative ? La loi de la jungle ? », leur dit-il, estimant, après une rencontre avec quelques ambassadeurs européens à Tunis, n'avoir pas besoin de demander la confiance de l'Assemblée nationale constituante où Ennahda dispose de 89 des 217 sièges. Il estime que l'ANC, en l'intronisant à la tête du gouvernement en 2011, lui a donné le droit de remanier son équipe. Un avis qu'un groupe d'experts, réunis par la présidence samedi, partage, selon un communiqué du palais de Carthage.Selon la loi d'organisation provisoire des pouvoirs publics, le chef du gouvernement peut « créer, modifier et supprimer les ministères et les secrétariats d'Etat, et fixer leurs attributions et prérogatives, après délibération du conseil des ministres et information du président de la République ». Au grand dam de la troïka et de Rached Ghannouchi, qui écarte tout risque de division de son mouvement tout en prévenant qu'il est prêt à faire descendre dans la rue ses militants pour défendre la « légitimité des urnes », la proposition du Premier ministre a été bien accueillie par la société civile et l'opposition qui a suspendu sa participation aux travaux de l'Assemblée constituante « afin de ne donner aucune légitimité à ce qui se passe en ce moment en Tunisie », explique Majed Hadj Ali, membre du Parti républicain. Le parti du Président quitte la coalition Le Congrès pour la République du président Moncef Marzouki, qui avait menacé, la semaine dernière, de quitter le gouvernement si les ministres des Affaires étrangères et de la Justice n'étaient pas remplacés, est passé à l'acte. Tirant les conséquences du rejet de ses demandes, il a annoncé, hier, que ses trois ministres (Formation professionnelle et Emploi, Condition féminine, Domaines de l'Etat et Affaires foncières) quittaient la coalition gouvernementale. Précision du porte-parole de ce parti : « cette décision n'a rien à voir avec la décision du Premier ministre de former un gouvernement de technocrates ». Le CPR et Ettakatol, l'autre parti membre de la coalition qui détient lui aussi trois portefeuilles ministériels (Tourisme, Affaires sociales et Education), ont critiqué la décision du Premier ministre de former un gouvernement de technocrates. Ils réclament un remaniement ministériel qui déboucherait sur l'attribution à des personnalités indépendantes de portefeuilles clés détenus par Ennahda. La troïka se disloque.