Bachar el-Assad est prêt « au dialogue avec tous ceux qui veulent le dialogue, y compris avec ceux qui ont du sang sur les mains. Parce que nous sommes convaincus que les réformes n'émergeront pas du bain de sang, mais du dialogue », déclare Walid al-Mouallem, son chef de la diplomatie. « Nous restons favorables à un règlement pacifique du problème syrien », dit-il, avant de rencontrer Sergueï Lavrov, son homologue russe qui « intensifie ses efforts visant à promouvoir la résolution la plus rapide et possible de la crise qui ravage la Syrie ». « Nous avons l'espoir de nouer des contacts entre le gouvernement et l'opposition et d'engager le dialogue auquel le Kremlin les a toujours appelés depuis le début des événements en Syrie », explique Lavrov. Selon Al-Mouallem, « une commission gouvernementale a été créée pour mener des pourparlers avec l'opposition dans le pays et même avec l'opposition à l'extérieur ». « Il n'y a aucune alternative acceptable au règlement politique par un dialogue entre le gouvernement et l'opposition », affirme le ministre russe, mettant en garde son homologue syrien contre les conséquences d'une poursuite du conflit armé qui a fait, en deux ans, près de 70.000 morts, selon les estimations de l'ONU. « Nous sommes à la croisée des chemins. Il y a ceux qui sont pour la poursuite du bain de sang, ce qui risque d'entraîner l'effondrement de l'Etat et de la société. Il y a des forces qui ont du bon sens et qui comprennent la nécessité d'entamer des négociations le plus vite possible pour trouver un règlement politique. Le nombre de ceux qui soutiennent cette ligne ne cesse d'augmenter », conclut le chef de la diplomatie russe insistant sur un fait : son refus de toute ingérence étrangère dans ce conflit. « Il revient au peuple syrien de décider de son sort sans intervention extérieure », dit-il. L'opposition, qui s'apprête à annoncer le 2 mars prochain à Istanbul, la formation d'un gouvernement « provisoire » pour gérer les territoires libérés, soit quelques heures après la réunion internationale des donateurs sur la Syrie, prévue ce jeudi à Rome, réserve une fin de non-recevoir à cette « ouverture ». Lavrov va-t-il convaincre Kerry ? « Les insurgés refusent toute négociation avec Damas avant le départ du président Assad et le retrait de l'armée des villes », affirme dans une entrevue avec la chaîne satellitaire arabe Al-Arabiya, le général Sélim Idriss. « Nous ne faisons pas confiance à ce régime (qui) peut se rétracter comme toujours », explique le chef d'état-major de l'armée rebelle. Comme l'opposition installée à l'étranger, il appelle au « jugement des responsables de sécurité et de l'armée qui ont donné l'ordre de tuer, et à l'arrêt des tueries ». Pour les analystes, les propos de Al-Mouallem, une semaine après « les signaux positifs » et du gouvernement et de l'opposition » en Syrie pour l'entame d'un dialogue, détectés par Lavrov ne sont pas fortuits. Ils interviennent à la veille de la première rencontre à Berlin entre ce dernier et John Kerry, le nouveau secrétaire d'Etat américain qui a « le sentiment que la Russie peut jouer un rôle clé pour convaincre le régime (syrien) et tout le monde du besoin d'une transition politique ». Ali Haidar, le ministre syrien de la Réconciliation nationale a proposé, il y a une semaine, des négociations directes, aux forces insurgées. Ces dernières ont, dans une déclaration, adoptée jeudi dernier, annoncé qu'elles sont disposées à entamer des négociations, mais après le départ du président El-Assad. Les pays intéressés par la crise syrienne vont-ils faire l'effort nécessaire pour amener pouvoir et opposition à la table des négociations avant que leur pays ne se désintègre ? A Genève, Navi Pillay, la haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, a fustigé, hier, l'échec du Conseil de sécurité à porter le cas syrien devant la Cour pénale internationale. « Malgré les rapports récurrents faisant état de crimes généralisées ou systématiques ainsi que de violations et émanant de mon bureau, de la commission d'enquête internationale sur la Syrie », dit-elle. Vuk Jeremic, le président de l'Assemblée générale de l'ONU, parle d'un « carnage » en Syrie. « Depuis près de deux ans, la communauté internationale n'a pas réussi à mettre un terme au carnage », dit-il à l'ouverture de la principale session annuelle du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU. Selon lui, « la cessation immédiate des hostilités devrait être notre première priorité. Elle doit être suivie d'un processus politique qui permettrait aux citoyens de la Syrie de déterminer librement le cours de leur avenir politique ».