Le dispositif de crédit que l'Etat a mis à la disposition de la femme et la volonté de cette dernière à contribuer aux finances de sa famille, l'ont aidée à changer de statut. La femme vient d'intégrer l'agroalimentaire pour en faire son gagne-pain. Fadéla Meghlli (productrice de confitures et de conserves faits maison) et Saïda Djellali (apicultrice), sont la résultante d'une opiniâtreté et l'exemple de révolte contre les idées reçues à l'égard des femmes rurales et celles que le mariage a confiné entre les murs au service du mari et des enfants. L'histoire de Fadéla Meghlli de Tlemcen a débuté il y a 7 ans. A l'âge de 56 ans, cette femme au foyer a décidé de changer de statut et devenir une femme ayant une place prépondérante dans la société en exerçant un métier. « Devenir productive et améliorer mon quotidien était un leitmotiv qui m'a aidée à aller de l'avant. Certes, mon savoir-faire et mon doigté dans la confection de la confiture, au début juste pour ma petite famille, étaient le point de départ de mon idée mais le dispositif d'aide aux femmes au foyer mis en place par l'Etat a contribué à la concrétisation de mon projet ». Mme Meghlli a contracté à deux reprises un crédit de 30 000 DA, puis un autre de 100 000 DA après remboursement des précédents. De l'argent destiné à l'achat de frigos, congélateurs, bocaux et autres récipients nécessaires pour la confection de la confiture. Aucun fruit n'échappe aux mains de Fadéla. Les fruits de saison mais aussi ceux qu'elle trouve dans d'autres régions du pays. « A chaque déplacement dans différentes wilayas, je recherche quelque chose de spécial pour confectionner des confitures inédites. Je suis à l'affût de la moindre nouveauté. Idem pour les conserves salées préparées et mises en bocaux avec l'aide de mes enfants. Les plus prisées sont les conserves d'artichauts, des olives, de la viande séchée et du poivron rouge doux ». Pour l'heure, Mme Meghlli confectionne 40 sortes de confitures. La commercialisation de ces produits du terroir préparés à l'ancienne, reste limitée à la région de Tlemcen ou lors des foires auxquelles participe Fadéla grâce à sa carte d'artisane. Fadéla caresse le rêve d'ouvrir son propre magasin afin d'élargir son activité. LES RUCHES ET LES ABEILLES, LE MONDE MERVEILLEUX DE SAIDA Saïda Djellali, native de Draria, à l'ouest d'Alger, du haut de ses 48 ans, n'a jamais accepté sa condition de femme au foyer, de rester les bras croisés loin d'une contribution à la rentrée d'argent de son couple. De l'élevage des lapins, la cuniculture, elle est passée à l'apiculture. Le monde des abeilles et de la ruche l'a fascinée. « Suite à une foire organisée à Riadh El Feth sur les différents crédits octroyés par l'Etat et la présentation de projets réussis, j'ai pris attache avec un apiculteur de Bou Ismaïl. Une rencontre qui a guidé mes pas vers ce domaine que j'ai aimé dès la première année d'activité tant sur le mode de l'élevage que sur les frais d'investissement. Les conseils des professionnels de la coopérative apicole et de l'association des apiculteurs de la wilaya d'Alger m'ont été d'un grand apport ». L'activité lancée grâce à un financement personnel et un stage à l'Institut de formation (IPEV de Baba Ali) lui ont permis de créer 38 ruches. « Ma première récolte était constituée de deux variétés de miel, l'oranger et l'eucalyptus vite commercialisées auprès de ma famille et mes connaissances ». Ce résultat est, pour Saïda Djellali, « plus qu'encourageant et j'aspire à agrandir mes ruchers ». Des démarches ont été effectuées auprès de l'Ansej pour un crédit. Toutefois, la disposition de l'emplacement reste pénalisante. En effet, un apiculteur doit remettre à la Chambre d'agriculture une attestation d'emplacement de ces ruches sur un champ. Or, celle délivrée par les EAC n'est pas reconnue par la Chambre. L'autre souci est que l'emplacement ne peut être définitif. Car l'apiculteur a besoin de transhumance pour diversifier le miel et augmenter la récolte. L'élevage des abeilles est, selon le directeur de la coopérative apicole de la wilaya d'Alger, Lyes Souici, « devenu, depuis 5 ans, un domaine très prisé par la gent féminine. Celle-ci s'appuyant sur les aides octroyées par l'Etat ne ménage aucun effort pour fructifier son investissement. Aujourd'hui, nous comptons une cinquantaine de femmes dans la wilaya d'Alger soit 10% du nombre total des apiculteurs du centre ». Saïda Djellali, maman de 4 enfants, affectionne cette nouvelle activité à telle enseigne qu'elle a initié son fils Hamza, un universitaire de 22 ans. Les exemples de Saïda et Fadéla attestent que les domaines de l'agriculture et de l'agroalimentaire sont devenus cette échappatoire pour éviter le chômage, fructifier son investissement et se faire valoir en tant que personne. En somme, la femme rurale reste un appui à l'essor économique.