La Cour pénale internationale (CPI) serait-elle en train de vulgariser la justice à deux vitesses? Atteinte de cécité devant les massacres à ciel ouvert d'Afghans, d'Irakiens, de Palestiniens, elle fait une fixation sur le Soudan. Curieusement, ses «inculpations» coïncident à chaque fois aux tentatives de Omar el-Béchir de trouver des solutions à ses deux gros problèmes : le Darfour et le Sud Soudan. Serait-ce pour provoquer l'échec des négociations entamées à Doha avec les rebelles du Darfour, casser l'accord de paix signé en 2005 ou susciter une crise au sommet de l'Etat ? Fait curieux, la CPI a décidé lundi, soit deux jours après le début des discussions directes, sous l'égide de l'Union africaine, en Khartoum et Juba sur les questions-clés qui se poseront au moment du référendum de janvier 2011 sur l'indépendance du Sud-Soudan, d'ajouter le génocide à ses chefs d'inculpation contre el-Béchir. Les juges qui ont délivré pour la première fois un mandat d'arrêt pour génocide et contre un président en exercice, ont estimé «qu'il y avait des motifs raisonnables de croire qu'il avait agi avec l'intention spécifique de détruire, en partie, les ethnies Four, Masalit et Zaghawa» les trois principales du Darfour. Le procureur Luis Moreno-Moreno l'accuse de retenir 2,5 millions de réfugiés issus de divers groupes ethniques au Darfour dans des camps «sous des conditions de génocide, comme un gigantesque Auschwitz». Il serait, selon les juges et Moreno, responsable du meurtre d'au moins 35 000 civils entre 2003 et 2005, de l'expulsion et du viol de centaines de milliers. Serait-ce pour rendre l'unité, voire l'idée d'une confédération moins attrayante ? Sans doute. Il ne viendrait à personne de s'associer à quelqu'un sur lequel l'étau se serre. Inculpé depuis mars 2009 de crimes de guerre et de crimes contre l'Humanité et responsable de l'élimination en partie de groupes ethniques depuis lundi dernier, le président soudanais voit avec cette nouvelle flèche de la CPI sa marge de manœuvre réduite. Les Etats-Unis qui n'ont pas signé le traité de Rome demandent au président soudanais de se présenter devant la CPI pour répondre aux accusations. Les autres membres du Conseil de sécurité pourraient le faire dans les prochains jours