Scandalisé par la décision de la Cour pénale internationale de justice, le gouvernement soudanais a annoncé aussitôt son refus de l'exécuter. Le président soudanais, Omar Hassan El Béchir, entre dans l'histoire. Pas pour ses prouesses faites à la tête du Soudan, mais parce qu'il est le premier chef d'Etat contre lequel la Cour pénale internationale (CPI) lance un mandat d'arrêt international. Accusé de « crimes contre l'humanité au Darfour (ouest du Soudan) », Omar Hassan El Béchir est désormais réclamé par la justice internationale. La CPI a, donc, satisfait à la demande émise, en juillet 2008, par son procureur, l'Argentin Luis Moreno-Ocampo. La chambre préliminaire a émis un mandat d'arrêt contre le président du Soudan Omar El Béchir pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité », annonce la porte-parole de la CPI, Laurence Blairon, lors d'une conférence de presse animée, hier, dans les locaux de la CPI à La Haye (Pays-Bas). La décision de la CPI est tombée comme un couperet sur la tête du président soudanais et les membres de son gouvernement. Ce dernier, scandalisé par la nouvelle, annonce aussitôt son refus d'exécuter la décision. Le ministre soudanais des Affaires étrangères, Ali Karti, a affirmé, lors d'une conférence de presse animée au Caire (Egypte), « le refus total de son pays de la décision de la CPI ». Intervenant sur la chaîne qatarie Al Jazeera, le ministre soudanais de la Justice, Abdel Basit Sabdarat, abonde dans le même sens. « Le Soudan n'a pas coopéré jusque-là et ne coopérera pas avec la Cour pénale internationale », a-t-il lancé. Et d'ajouter : « Nous ne traiterons pas avec cette cour. Elle n'est pas compétente. Il s'agit d'une décision politique. » Les déclarations des membres du gouvernement rejoignent celles faites, mardi dernier, par Omar Hassan El Béchir lui-même. « Toute décision de la CPI n'aura aucune valeur et elle ne vaudra pas l'encre avec laquelle elle aura été écrite », a-t-il estimé. La position des responsables soudanais est appuyée par les partisans du président Omar Al Bachir, qui ont manifesté dans les rues de Khartoum contre la décision de la Cour internationale. Cela, alors que le procureur de la CPI a rappelé que « le gouvernement soudanais est obligé d'exécuter le mandat d'arrêt ». Si le gouvernement soudanais s'est montré outré, la rébellion du Darfour se réjouit de la décision. Le chef rebelle darfouri et chef du mouvement pour la libération du Soudan qualifie cette décision de « grande victoire pour les victimes du Darfour et du Soudan ». « Bachir et son cabinet n'échapperont plus à la justice et quiconque commet un génocide saura qu'il n'aura plus de liberté de mouvement dans le monde après la décision de la CPI », a-t-il dit. Ce mandat d'arrêt, a-t-il soutenu, « changera beaucoup de choses ». « L'espoir est grand que les massacres en cours vont s'arrêter, le génocide va certainement cesser », a-t-il souhaité.La communauté internationale est, quant à elle, divisée. La communauté internationale partagée Les pays occidentaux qui soutiennent cette décision appellent le gouvernement soudanais à la retenue. Washington, Paris, Londres et d'autres capitales occidentales ont prévenu le gouvernement soudanais et toutes les parties dans le pays contre des violences supplémentaires contre les civils et les intérêts étrangers. Elles appellent aussi le gouvernement soudanais à coopérer avec la CPI. Dans ce sens, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé Khartoum à « assurer la sécurité de la population civile et des personnels de l'ONU ». Les ONG internationales ont également salué la décision de la CPI. En revanche, les pays africains et la Russie ont dénoncé cette sentence qui, selon eux, menacerait les efforts de paix dans la région. « La décision inopportune de la CPI créera un dangereux précédent et risque d'avoir des conséquences négatives sur le Soudan », a déclaré l'émissaire russe pour le Soudan Mikhaïl Marguelov. Pour l'Union africaine (UA), le mandat en question « est une menace pour la paix ». « Les impératifs de justice ne peuvent ignorer les impératifs de paix », a précisé le président de la Commission de l'UA, Jean Ping. Il a déploré, dans la foulée, que « la CPI ne s'intéresse qu'à l'Afrique, comme si rien ne se passait ailleurs ». Alors que l'Ethiopie annonce qu'elle ne reconnaîtra pas cette décision, l'Egypte se dit profondément perturbée. La Libye et le Sénégal ont également dénoncé cette décision. Pour sa part, le Hamas palestinien demande une décision similaire contre Israël pour les crimes de guerre commis à Ghaza.