La défiance islamiste ne semble pas lâcher prise dans les fiefs des Frères musulmans grouillant de manifestants mobilisés pour maintenir la pression sur le nouveau régime de Adly Mansour qu'il considère illégitime. Au lendemain des plus grandes manifestations jamais connues en Egypte, des sit-in ont été tenus dans les deux sites qu'ils occupent maintenant depuis près de trois semaines : la mosquée Rabaâ al-Adawiya, dans le faubourg de Nasr City, et les abords de l'Université du Caire, beaucoup plus proche du centre-ville. Hier matin, dressant des tentes et installant des barrages sur les voies d'accès, les militants islamistes convergeaient par centaines. D'autres manifestations ont également eu lieu dans plusieurs villes de province, comme à Alexandrie (nord). Face à l'action des Frères musulmans, la mobilisation est toujours de mise dans le camp de la légendaire place Tahrir, fêtant encore dans une ambiance festive la destitution de Morsi et, comme c'était le cas dans la soirée de vendredi, brandissant des portraits du général Sissi, près du palais de la Présidence. La bataille de la rue des deux Egypte n'est pas sans poser dans toute son acuité la question névralgique de la sécurité menacée par le bras de fer imposé par des islamistes tentant en vain de faire de nouveau le siège du ministère de la Défense et du quartier général de la Garde républicaine, avant d'être empêchés par l'armée d'y accéder. Le spectre de la journée fatidique du 8 juillet (50 morts) a dangereusement plané. A l'effet d'endiguer la montée de la violence, le président intérimaire Adly Mansour se déclare déterminé à mener la « bataille de la sécurité jusqu'au bout » pour stopper la dérive sanglante et le radicalisme des groupes islamistes fortement implantés dans le Sinaï. « Nous sommes à un moment décisif de l'histoire de l'Egypte », a ajouté le président Mansour, accusant « certains » de vouloir « entraîner dans l'inconnu » l'Egypte. Le défi islamiste, dans sa version modérée et extrémiste, est levé dans la nouvelle Egypte qui fait peau neuve et entend se débarrasser de l'héritage contesté de Morsi accusé par le général Sissi de « trahison ». Un signe fort éloquent : le rapprochement avec la Syrie dont les relations diplomatiques rompues, le mois dernier, sont appelées à être « réexaminées », selon le ministre des Affaires étrangères Nabil Fahmy. « Cela ne veut pas dire qu'elles vont reprendre », précise le chef de la diplomatie égyptienne. Mais le refus du « djihad en Syrie » renseigne sur la nouvelle perception du Caire désormais acquise à la solution politique au conflit syrien.