Les jours d'Ennahda et de ses deux alliés au pouvoir, Congrès pour la République et Ettakatol, sont-ils comptés après l'assassinat de l'opposant Mohamed Brahmi dont une foule monstre a assisté, hier, à l'enterrement dans le carré des martyres aux côtés de Chokri Belaïd, l'autre opposant de gauche assassiné en février dernier ? Sortie indemne de la crise qui a failli emporter le pays au lendemain de l'attentat qui a visé Chokri Belaïd, la troïka risque, cette fois-ci, de laisser des plumes devant une opposition de gauche décidée Et ce ne sont pas les milliers de personnes qui ont manifesté vendredi après-midi à Tunis pour soutenir le gouvernement qui la feront reculer. Preuve suprême : cinquante trois députés appartenant à l'Union pour la Tunisie, qui fédère des formations autour du principal parti d'opposition nationaliste de gauche, Nidaâ Tounès, le parti de l'ancien Premier ministre Béji Caïd Essebsi, se sont retirés de l'Assemblée nationale constituante (ANC), non sans appeler à la dissolution de celle-ci et à la chute du gouvernement. « Il s'agit d'une première phase d'un processus visant la dissolution de la Constituante et la chute du gouvernement », a déclaré Khemaies Ksila, un dirigeant de Nidaâ Tounès. La protesta de l'opposition ne s'arrêtera pas là. Ses militants entendent organiser un sit-in ouvert devant le siège de l'Assemblée constituante dont les membres affirment avoir finalisé la mouture du très controversé projet constitutionnel. Issam Chebbi, dirigeant du parti El Joumhouri (le républicain), a proposé de confier l'achèvement de la rédaction de la Constitution à un comité d'experts et proposer la formation d'un « front de salut national ». Autre démonstration de force : des partis politiques et des composantes de la société civile ont annoncé, le même jour, la création d'un Front de salut national qui sera chargé, à travers un gouvernement restreint, chapeauté par une personnalité nationale consensuelle, de gérer provisoirement les affaires courantes du pays et préparer les prochaines élections. Les signataires, qui imputent la responsabilité des violences à la troïka au pouvoir, appellent à la désobéissance civile et pacifique dans tous les secteurs, à l'exception des urgences, des pharmacies et des boulangeries.