Les experts du Comité des Nations unies pour l'élimination de la discrimination raciale de l'ONU (CERD) clouent au pilori la France où Nicolas Sarkozy vient de définir des grades dans la nationalité française. « La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un fonctionnaire de police, d'un militaire de la gendarmerie» dit-il. Les 18 experts du CERD ont rendu public jeudi un rapport de 100 pages sur la France et sa politique vis à vis des minorités et des discriminations. Ils s'inquiètent ouvertement du climat de racisme et de xénophobie qui règne actuellement dans la patrie des droits de l'Homme. Selon eux, le débat sur l'identité nationale, la volonté de déchoir de la nationalité française les criminels d'origine étrangère expriment une « recrudescence notable du racisme et de la xénophobie ». Certains estiment que la politique d'expulsion menée envers « les Roms et les gens du voyage rappelle l'époque de Pétain ». Comme « s'ils n'appartenaient pas à l'Union européenne» qui a déjà consacré deux sommets depuis 2008 aux 10 à 12 millions de Roms dont 350.000 à 500.000 en France et jouissant pour 95% d'entre eux de la nationalité française. Outre ces inquiétudes (plus de 40 camps de Roms démantelés en 15 jours), les experts s'interrogent sur les récentes déclarations de Nicolas Sarkozy à propos de la déchéance de nationalité. «Je ne comprends pas ce que c'est qu'un Français d'origine étrangère», s'est exclamé le représentant turc du Comité, Gun Kut. Un constat partagé par les associations et les ONG de lutte contre le racisme qui s'interrogent sur le sens à donner aux propos d'un président qui piétinent la Constitution française et la Déclaration des Droits de l'homme qui proclament «l'égalité absolue de tous les citoyens devant la loi». Sarkozy veut renvoyer dans les pays d'origine de leurs parents des Français. Notamment ceux originaires d'Afrique et du Maghreb, synonymes de voyous, dans son lexique sécuritaire. «Nous subissons les conséquences de 50 ans d'immigration insuffisamment régulée qui ont abouti à un échec de l'intégration», dit-il pour « justifier » sa démarche. La présidence française refuse ces critiques qui viennent s'ajouter au conflit, déjà ancien, qui oppose l'Hexagone à l'ONU sur les « statistiques ethniques ». « C'est un montage pur et simple », affirme Claude Guéant, le principal collaborateur de Nicolas Sarkozy à l'Elysée. « L'ONU ne critique pas la France. Il y a un comité qui réfléchit et des personnes qui se sont exprimées à titre individuel. Le comité, lui, rendra son avis le 27 août », dit-il. Les sarkozystes qui préparent les présidentielles de 2012 en chassant sur les terres du Front national, crient au scandale. Pierre Lellouche, le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, explique sans convaincre grand monde, que « la France est un Etat de droit rigoureusement respectueux des Droits de l'Homme dont elle a été la première inspiratrice depuis deux siècles ». La France, dit-il, s'attache à garantir « les libertés publiques ». Soucieux d'apaiser les discussions, ils annoncent le lancement à la rentrée d'un plan de lutte nationale contre le racisme. Un plan que les organisations internationales réclament depuis « une dizaine d'années ». «M. Le Pen et sa fille n'ont plus besoin de parler. La copie parle à leur place», estime Noël Mamère (les Verts). Eva Joly, d'Europe Ecologie, parle d'attitude fasciste. « Le tir de barrage contre les Roms et l'insécurité relève d'une éthique de la provocation, d'un racisme d'Etat. Nicolas Sarkozy va détruire la droite républicaine », déclare l'ancienne juge d'instruction et eurodéputée, redoutant, comme la majorité de ses concitoyens, cette transformation en douce de la France en Amérique des années Bush.