Sur instruction du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, l'institution du général-major Ahmed Bousteila a durci son système de contrôle et de surveillance sur la bande frontalière et multiplié les patrouilles. Selon le responsable de la communication de cette institution, le lieutenant-colonel Abdelhamid Kerroud, la nouvelle stratégie consiste en la mise en place d'un dispositif composé de trois ceintures sécuritaires. « Les groupements des gardes frontières (GGF) ont été instruits pour une action commune en même temps, c'est-à-dire une coordination entre les GGF des postes avancés, ceux des postes d'observation et ceux des escadrons et groupements », indique-t-il. Un dispositif de coordination est mis également mis en place entre les GGF et les groupes d'intervention et de réserve (GIR). En outre, des sections de sécurité et d'intervention (SSI) sont injectées dans le dispositif de patrouilles alors que les unités territoriales ont été mobilisées comme troisième ceinture pour le contrôle routier. Ces mesures ont été prises suite à l'évolution importante des phénomènes de la contrebande et du trafic de carburant. Ce dernier connaît une hausse surtout durant la saison estivale. Ainsi, durant le premier semestre de l'année en cours, les services de la GN ont traité 1.550 affaires d'exportation illégale de carburant, qui se sont soldées par la saisie de 813.178 litres, soit une augmentation de près de 22% par rapport à la même période de l'année 2012. Les gendarmes ont saisi plus de 1 053 bêtes de somme, 493 véhicules et 83 motos utilisés dans ce trafic. Selon une étude analytique de la Direction de la police judiciaire auprès le commandement de la Gendarmerie nationale, un litre de gasoil vendu 13 DA en Algérie coûte l'équivalent de 118 DA au Maroc et 93 DA en Tunisie. Un litre d'essence vendu 23 DA en Algérie coûte l'équivalent de 209 DA au Maroc et 164 DA en Tunisie. Des propriétaires de stations complices des hallabas Cette contrebande a fait que la consommation annuelle de carburant dans la wilaya de Tlemcen pour l'année 2012 s'est élevée à 648 942 m3. Cette consommation représente 63% de celle de la wilaya d'Alger et 200% de celle de la wilaya d'Oran, sachant que son parc auto est huit fois moins dense que celui de la capitale et équivaut à la moitié de celui de la wilaya d'Oran. Autre exemple : le gasoil. Tlemcen en a consommé un volume de 421 671m3 en 2012, ce qui représente trois fois les besoins annuels d'Aïn Defla et de Tiaret réunies. Cette consommation ne trouve son explication que dans les besoins de l'agriculture marocaine, développée dans les zones frontalières. A l'extrême est, le même phénomène se répète A Tébessa, 291 241 m3 de carburant ont été consommés. Par rapport à Médéa, wilaya de même importance, Tébessa « brûle » 50.000 m3 supplémentaires. Selon l'étude de la gendarmerie, le nombre de stations-services au niveau des régions frontalières du Nord est particulièrement édifiant à Tlemcen avec 70 stations-services et Tébessa avec 54. L'étude signale, dans ce sens, que les enquêtes de la GN ont prouvé l'implication de certains propriétaires et agents de ces stations. Conséquence : la gendarmerie en a fermé 16 entre 2010 et 2012 dans la wilaya de Tébessa. En outre, l'analyse fait ressortir qu'en plus des facteurs communs favorisant la contrebande, le trafic de carburant est encouragé par le gain facile induit par la différence considérable des prix pratiqués dans les pays voisins, notamment suite aux augmentations du prix du carburant durant ces dernières années. Il n'est donc pas étonnant que la contrebande représente 33,74 % du crime organisé. Les unités de la GN ont traité 2.341 affaires dont 66,21% relatives au trafic de carburant qui se sont soldées par l'arrestation de 831 personnes. Dans ce cadre, il a été révélé que parmi les personnes arrêtées, près de 58% sont des chômeurs, réparties sur toutes les tranches d'âge, en particulier celle des 18-40 ans. Les mineurs représentent 5% des personnes impliquées dans la contrebande et 14% sont âgées de plus de 40 ans. Selon les données de la GN, cette activité demeure concentrée dans la zone Est, soit 43% à Tébessa, Souk Ahras et El Tarf, suivie par la frontière ouest avec 37% à Tlemcen et Naâma, 8% au niveau des frontières sud. La mission des gendarmes ne semble pas facile. Et pour cause, ils font souvent l'objet d'agressions de la part des contrebandiers, leurs acolytes et leurs familles, particulièrement dans la région de Tébessa où 16 cas ont été recensés et 4 autres à Tlemcen. Pour éviter de tels désagréments, le commandement de la GN a mis en place des groupements d'intervention et de réserve (GIR) chargés du maintien de l'ordre.