La crise prend des proportions dangereuses en Libye. Les attentes démocratiques de la transition et les promesses de changement ont été laminées par la loi du Talion qu'imposent les milices, à la montée des revendications autonomistes et à l'émergence-du Sud aux mains d'El Qaïda, allant à Tobrouk, Benghazi et Derna-de la nébuleuse terroriste dans cette zone de vaste rassemblement des mouvements islamistes décampant du Mali ou tout simplement délogés de leur sanctuaire afghan et du Waziristân. C'est là la quintessence du message de l'un des chefs des tribus Toubous, Issa Abdelmadjid, révélant l'existence des camps d'entraînement dans le Sud libyen dirigés par des groupes terroristes qui se comportent comme « chez eux ». Le risque de la sanctuarisation du Sud libyen et la prolifération des armes à ciel ouvert, dénoncés par l'Algérie, sont des réalités intangibles reconnus par des dirigeants libyens et la communauté internationale. Cette décomposition n'a pas épargné les institutions de transition confrontées au bouillonnement. Mis au banc des accusés pour son incapacité de rétablir la paix dans le pays, en proie à l'anarchie, le gouvernement d'Ali Zeïdan, en poste depuis un an, vacille et devra compter dorénavant sans les ministres islamistes qui détiennent les cinq portefeuilles (sur 36) névralgiques du Pétrole, de l'Electricité, de l'Habitat, de l'Economie et des Sports. Et si la motion de défiance n'a pas abouti, faute de quorum (99 signatures au lieu de 120 sur les 194 membres que compte le Congrès général national), la volonté de provoquer la paralysie institutionnelle est manifeste dans ce retrait des ministres du Parti pour la justice et la construction (PJC). La bravade est interprétée comme une tentative de déstabiliser le gouvernement Zeïdan qui ne veut lâcher céder aux pressions islamistes. Tout en accusant ses adversaires d'user de tous les moyens pour saborder l'action gouvernementale, le chef du gouvernement libyen n'entend pas céder aux demandes de « démission » pour ne pas provoquer une « vacance de pouvoir ». Bien plus, il a annoncé, le 8 janvier, un remaniement pour la formation d'un « gouvernement apolitique ». Zeïdan, qui ne veut pas « laisser le pays » dans une situation chaotique, réfute fermement les accusations d'échec qu'il impute à la prolifération des armes. Au même moment, la flambée de violence a accompagné la fronde islamiste. A Tripoli où au moins 5 personnes ont été tuées dans des affrontements entre des groupes armés et les « thowars », comme à Tripoli où les forces spéciales de l'armée ont été tuées dans l'explosion de leur voiture, le front sécuritaire prête effectivement à l'inquiétude.