« Le Congrès national général a, en coordination avec la Haute Commission électorale, décidé de fixer les élections de la commission des 60 pour le jeudi 20 février », déclare, au cours d'une cérémonie à Tripoli, Nouri Abousahmain, le président du parlement intérimaire dont le mandat expire théoriquement le 7 février. Mais pour éviter d'aggraver le vide à la tête de l'Etat, ses élus » l'ont prolongé jusqu'en décembre 2014. Et d'ajouter : cette Constitution « réalisera la paix et la quiétude » et « permettra d'assurer l'unité des Libyens ». « Nous souhaitons que le peuple libyen se réconcilie et soutienne ces élections », conclut-il, précisant à l'endroit des Libyens de l'étranger qu'ils pourraient voter « les 15, 16 et 17 février ». Une fois élus, les 60 membres représentant à égalité les trois régions historiques - la Cyrénaïque (est), le Fezzan (sud) et la Tripolitaine (ouest) - et les minorités (Toubou, Amazigh et Touareg) 6 sièges et autant pour les femmes, auront 120 jours pour rédiger la nouvelle Constitution. Celle-ci sera ensuite soumise à référendum. Si le texte est approuvé, des élections législatives seraient organisées avant la fin de l'année. Le texte doit trancher des questions clés allant du système de gouvernement au statut des minorités, en passant par la place de la charia. 692 candidats dont 73 femmes devraient se présenter à ce scrutin très attendu depuis longtemps. Et pour cause ! Il a été reporté à plusieurs reprises depuis 2012 car les membres du Congrès qui sont divisés foncièrement en deux, islamistes et nationalistes, n'arrivaient pas s'entendre sur le mode du scrutin et la réponse à donner aux Amazighs du Sud qui menacent de boycotter le scrutin s'ils sont sous-représentés et si leur langue n'est pas considérée comme l'une des langues officielles de l'Etat. Outre ces divergences politiques, la Libye souffre d'une insécurité criante. Au nord d'abord. Les forces spéciales de l'armée sont régulièrement la cible d'assassinats et d'attaques. Notamment à Benghazi, chef-lieu de l'est libyen. Derniers actes criminels en date : l'enlèvement de Wanis Abou Khamada, le fils du commandant des forces spéciales de l'armée libyenne à Benghazi et les heurts qui ont opposé à Sebha, dans le sud, du 11 au 25 janvier, des forces de sécurité à des groupes armés, accusés d'être des partisans de l'ancien régime. Selon un communiqué du ministère libyen de la Santé publié le 25 janvier, ces heurts qui ont commencé suite à un différend entre Toubou, une ethnie présente dans trois pays (la Libye, le Niger et le Tchad), et la tribu des Ouled Slimane à Ouerchfana, à l'ouest de Tripoli, ont fait 154 morts et 463 blessés. Les troubles dans le sud inquiètent les Occidentaux Ce manque d'ordre inquiète les Occidentaux. Depuis peu, ils laissent entendre que le sud libyen pourrait devenir un « nouveau centre de gravité » pour les groupes terroristes affiliés à al-Qaïda. « En Libye, l'idéal serait de monter une opération internationale », estime l'amiral Edouard Guillaud, chef d'état-major des armées françaises, regrettant dans la foulée l'absence d'un état dans le nord. « Nous n'irons pas sans mandat (...). Il faudra bien se poser la question de la sécurisation du sud de la Libye », dit-il, indiquant que cela fait de longs mois que le sud libyen fait l'objet d'une surveillance particulière. Selon lui, cette vision est partagée par nombre de ses homologues étrangers. Ces propos ont créé un certain émoi en Libye. Sans plus. Tripoli, qui se dit surprise, ne ferme pas la porte à cette option. D'autant qu'elle doit gérer dans l'immédiat l'approche du 7 février et es tensions qui s'accroissent sur tout le territoire. « La communauté internationale ne peut pas tolérer un Etat en pleine Méditerranée qui est source de violences, de terrorisme et d'assassinats », a prévenu, en novembre 2013, le Premier ministre Ali Zeidan. Mercredi, à Tripoli, le ministre de l'Intérieur par intérim, Seddik Abdelkarim, est sorti indemne de son véhicule pris pour cible par des tireurs. « La situation en Libye est difficile. Il y a beaucoup d'armes et l'Etat a du mal à imposer son autorité », estime Laurent Fabius, le patron de la diplomatie française.