De retour d'Irak, le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, s'accroche à la « petite lueur d'espoir » que représente l'avènement d'un gouvernement d'union nationale de Haider Al Abadi, béni par la communauté internationale de façon unanime et perçu comme la condition majeure pour lancer la bataille commune contre la menace de l'EI ( Etat islamique). La bonne nouvelle du « soulèvement » armé d'importantes tribus sunnites de la province d'Anbar, contrôlée depuis janvier par l'EI, signe le retour à l'union sacrée des Irakiens, déterminés à mener la bataille contre la menace de partition représentée par l'émirat du calife autoproclamé El Baghdadi et le référendum d'indépendance maintes fois brandi par le Kurdistan. Fort logiquement, le chef de la diplomatie a plaidé la nécessité de veiller au respect de « l'intégrité territoriale » en opposant un niet catégorique à « un Etat indépendant kurde » porteur de risques de nouvelles tensions et de déstabilisation de la région. C'est pourquoi, le soutien sans équivoque à « la dernière chance pour l'unité de l'Etat irakien », pleinement réaffirmé lors de sa rencontre officielle avec El Abadi, traduit le changement de cap européen passant de « l'aide humanitaire » à un engagement adapté à l'approche de chaque pays membre. Si la France et la Grande-Bretagne, en chefs de file des interventionnistes, ont donné le feu vert pour la livraison d'armes « sophistiquées », réclamées à cor et à cri par le président kurde Massoud Barzani, les réticences restent vives parmi les Européens. Le front des opposants (Allemagne, Suède, Irlande, Finlande et Autriche), inquiets des tentations indépendantistes kurdes, prône une démarche pragmatique pour éviter le risque de voir les armes tomber entre de mauvaises mains. C'est le cas notamment de l'Allemagne, privilégiant la fourniture d'armes non létales. L'Europe, qui monte au front, tentée par les perspectives heureuses d'une implication de tous les pays de la région, conforte le consensus international récemment exprimé par le Conseil de sécurité lors de l'adoption de la résolution pour réclamer le désarmement et la dissolution de l'EI et empêcher le recrutement et le financement des groupes terroristes en Syrie et en Irak. Des responsables de l'EI et du Front Al-Nosra sont portés sur la liste noire. Au regard du refus russe et chinois, le scénario d'une intervention étrangère est improbable. Mais...