L'Afrique serre les rangs pour se mobiliser contre la menace terroriste qui déferle sur le continent. A l'ouverture du sommet de Nairobi, le président en exercice du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine (UA) a donné le ton à la coopération africaine dictée par les défis posés par les filiales d'al Qaïda. « Nous sommes inquiets pour la paix et la stabilité de notre continent », a déclaré le chef de l'Etat tchadien Idriss Déby évoquant les « attaques dans la région du Sahel, les actes terroristes de Boko Haram au Nigeria et dans d'autres régions d'Afrique de l'Ouest ». Il est clairement établi que « le terrorisme et le crime organisé nous obligent à mener une action commune », a martelé le président tchadien. Fait pour le moins significatif de la prise de conscience de la communauté internationale : la frappe aérienne des Etats-Unis contre les dirigeants des Shebab en conclave à la veille du sommet de Nairobi. « Les Shebab continuent de représenter une grave menace dans la région », a souligné le président kenyan, Uhuru Kenyatta, dont son pays reste une cible privilégiée d'al Qaïda au même titre que le somalien, Hassan Cheikh Mohamud, et le Nigérian Goodluck Jonathan. L'Afrique est donc bien partie pour constituer un front uni. Au sommet de Nairobi qui doit durer une journée, des « mesures pratiques » sont naturellement attendues pour lancer la bataille stratégique contre « le terrorisme en Afrique ». C'est en pionnier que l'Algérie assume un héritage lourd de sacrifices chèrement consentis en solitaire lors de l'épreuve terroriste de la « décennie rouge » et comptabilisé en acquis universellement admis dans le monde post-11 septembre ». La dure école algérienne a largement profité en expériences intangibles, non seulement en matière de réformes démocratiques, mais aussi et surtout en faveur de la promotion de la paix et de la sécurité au Maghreb et en Afrique. Il s'agit en l'occurrence de souligner l'apport de l'Algérie dans la dotation du Conseil de sécurité et de paix de l'UA, comme il est important de relever « le rôle central » dans la préservation de l'unité de la Libye, reconnue par le ministre libyen des Affaires étrangères, Mohammed Abdelaziz en marge du sommet du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine. « Nous attendons un geste fort de la part des participants au sommet pour soutenir la légitimité libyenne représentée par le parlement et le gouvernement provisoire », dira-t-il en marge du sommet de Nairobi. Au Mali voisin, la médiation consensuelle algérienne affiche un optimisme exprimé par les participants au dialogue inclusif dont le lancement de la 2e phase du processus, ouverte lundi, laisse entrevoir les prémices d'une solution durable de la crise du Nord malien. La voie forte de l'Algérie a retenti à Nairobi pour revendiquer une riposte mondiale concertée. « Il faut qu'il y ait des mesures énergiques et solidaires de toute la communauté internationale en matière de lutte contre le terrorisme et notamment de tarissement de ses sources de financement », a déclaré le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, qui s'appuie, en l'occurrence, sur l'éventail d'actions initiées depuis une quinzaines d'années, par l'Algérie en Afrique : la convention africaine de lutte contre le terrorisme qui a été adoptée par le sommet des chefs d'Etat africains lors de la 35e session tenue en 1999 à Alger, le protocole additionnel de la convention africaine de lutte contre le terrorisme adopté en 2004, la mise en place du Centre africain d'études et de recherche sur le terrorisme (CAERT) dont le siège est à Alger pour exercer une fonction de veille et d'alerte du terrorisme... Mais, c'est dans le domaine sensible du paiement de la rançon qu'elle s'applique, au niveau africain et au Conseil de sécurité de l'ONU, à parfaire la doctrine destinée à tarir les sources de financement du terrorisme et à pénaliser le paiement des rançons. Elle travaille, en conséquence, dans le cadre de l'UA, pour élargir le consensus international et à convoquer l'Assemblée générale de l'ONU pour négocier un protocole additionnel à la convention internationale de lutte contre le terrorisme et le paiement des rançons. Au plan de la coopération policière, le ministre algérien a cité le mécanisme africain de coordination et de coopération des institutions policières (Afripol), adopté par l'Association des chefs de police africains lors de leur dernière réunion en février dernier à Alger. Cette force de police du continent, dont le siège sera à Alger, a pour objectif de renforcer la coopération entre les forces de police africaines pour répondre aux menaces générées par le trafic de drogue et d'êtres humains ou encore la cybercriminalité. Le ministre a révélé, par ailleurs, la mise sur pied récente par le Conseil de paix et de sécurité de l'UA d'un comité de chefs d'Etat de cinq pays présidé par l'Algérie (Algérie, Afrique du Sud, Nigeria, Guinée équatoriale, Ethiopie) et dont la mission consiste à « piloter » l'action africaine de lutte contre le terrorisme. De Nairobi à Alger, l'accomplissement du destin solidaire invite assurément à un juste retour à l'école algérienne.