C'est la sempiternelle problématique à la veille de chaque fête de l'Aïd el Kebir : cher, pas cher, le mouton ? Une petite virée dans un marché improvisé, jouxtant l'hôtel Thiziri, pour se faire une idée. Il n'y avait pas cohue en cette fin d'après- midi. Des moutons, il y en avait, ainsi que des monticules de bottes de paille, verte ou jaune, mais peu de vendeurs en réalité. Les clients aussi ne se bousculaient pas au portillon de ce terrain clôturé visiblement utilisé comme aire de stockage d'engins. Par contre, beaucoup de gamins accompagnaient leurs parents, ravis d'approcher ces bêtes qu'ils rêvent de promener en laisse comme un petit chien et se pavaner devant les petits copains. « 49 », répondit le vendeur, sur un ton qui laissait croire qu'il n'avait pas espoir que ce client en fut vraiment un. L'autre répéta « 49 », comme s'il avait du mal à imaginer la somme. Mais 49.000 DA était bien la somme demandée. Le vendeur tenta d'intéresser son vis-à-vis, en l'assurant que la bête était d'une belle qualité et qu'elle était indemne de toute affection et qu'elle avait été examinée par un vétérinaire. Deux pas plus loin, un autre vendeur expliquait à deux jeunes qui avaient l'air d'avoir été charmés par un mouton d'un bon gabarit, qu'il cédait ses bêtes avec toutes les garanties possibles et qu'ils pouvaient même leur fournir son adresse si jamais le mouton montrait quelque travers, comme un manque d'appétit ou de sommeil ! « Faites votre offre », les encourageait-il, évitant de fixer lui-même un prix à sa bête. Si de ce côté-là, la mercuriale variait entre 40 et 50.000 dinars, un peu plus loin, d'aucun pouvait acquérir un mouton pour un prix moindre. « On m'a offert 30.000 dinars pour ce mouton », fit le vendeur en pointant la bête, d'un petit gabarit, tirant la moue à son interlocuteur. Un autre enclos donnait à voir des moutons assez imposants par leur taille et celle de leurs cornes. Assez agressifs d'ailleurs, puisque des bagarres éclataient sporadiquement, faisant la joie des bambins. Les prix aussi étaient maxi. A 61.000 dinars, le vendeur n'était pas prêt à céder le bélier. Les potentiels acheteurs aussi n'avaient pas le courage de consentir un tel sacrifice. Il leur reste encore quelques jours pour trouver un terrain d'entente qui enverra le mouton vers d'autres verdoyantes prairies.