La menace terroriste est perceptible dans la vieille Europe, sur le pied de guerre, qui s'arme du tout-sécuritaire : Paris sous l'emprise d'un Vigipirate renforcé et déployant près de 10.000 militaires, Bruxelles quadrillée par 300 soldats et décidant d'une surveillance accrue de certains sites sensibles à Anvers et dans la capitale. En Allemagne, qui a effectué un coup de filet « dans la mouvance islamiste », la résurgence du « risque terroriste concret » a conduit à l'annulation de « tout rassemblement public en plein air » qui viserait le mouvement anti-islam, Pegida, contraint de faire marche arrière. Dix jours après les attentats meurtriers de Paris, l'onde de choc a provoqué un véritable séisme qui a non seulement ébranlé l'Europe impuissante à contenir la déferlante terroriste, mais également révulsé le monde musulman froidement ciblé par une campagne islamophobe. L'heure est donc à la mobilisation générale qui se nourrit de l'« esprit du 11 janvier », inscrit dans le sommet mondial du 12 février prochain, qui sera précédé par la réunion des ministres de l'Intérieur à Riga (Lettonie) le 28 janvier. Hier, les ministres des Affaires étrangères se sont retrouvés à Bruxelles pour composer l'agenda européen dominé, outre la question sensible de l'Ukraine et des relations entre la Russie et l'Europe, par la nécessaire coopération imposée par le défi terroriste prégnant. « Nous allons discuter de la manière de lutter contre le terrorisme, pas seulement en Europe mais dans le reste du monde », a déclaré la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. « Les attaques terroristes ciblent surtout les musulmans dans le monde, il nous faut donc une alliance, un dialogue pour faire face ensemble », a-t-elle ajouté. L'approche commune ne saurait être circonscrite à « une question militaire ou sécuritaire », selon le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, présent à cette rencontre. Elle appelle à une réflexion « au niveau intellectuel, culturel, médiatique, religieux ». Dans cet élan de solidarité mondiale, les priorités européennes portent essentiellement sur la coopération en matière de renseignement, le renforcement des contrôles aux frontières de l'espace Schengen, la lutte contre le trafic d'armes ou la création d'un registre commun des passagers aériens (PNR) dénoncé par le Parlement européen. « Nous espérons, compte tenu de ce qui s'est passé en France, en Belgique et ailleurs, que le Parlement européen va comprendre qu'il faut débloquer le PNR », a plaidé le ministre français, Laurent Fabius. Face à ses « londonistan » et une armée de « combattants étrangers » de l'Etat islamique, l'Europe est rattrapée par les vieux démons du terrorisme longtemps couvés à l'aune des droits de l'Homme et de la démocratie.