15 des 17 candidats à l'élection présidentielle du 30 août 2009, dont l'ex-ministre de l'Intérieur André Mba Obame et l'opposant Pierre Mamboundou, arrivés, selon les chiffres officiels, en deuxième et troisième positions, se sont fédérés lundi soir à Libreville en un front du refus. Ils refusent globalement et dans le détail les résultats proclamés le 3 septembre par la Cour constitutionnelle. L'opposition ne désarme pas. Les candidats malheureux réclament un nouveau dépouillement des suffrages. «Nous exigeons un recomptage sur la base des procès-verbaux de tous les bureaux de vote», disent-ils dans leur communiqué commun. Selon eux, le procès-verbal de centralisation des résultats que leurs représentants à la Commission électorale nationale autonome et permanente (CENAP) ont refusé de signer a faussé les résultats avec les bourrages des urnes et les gonflements des listes électorales en faveur d'Ali Bongo, le candidat du parti au pouvoir. Sûrs de leur capacité de nuisance, ils menacent le nouveau président Ali d'«actions graduelles» et demandent une commission d'enquête internationale pour déterminer la responsabilité des troupes armées, «essentiellement de mercenaires étrangers», précisent-ils, dans la répression, notamment à Port-Gentil, la capitale économique du pays (elle produit à elle seule les trois quarts de la richesse du pays) et la destruction des locaux et du matériel de diffusion de deux télévisions privées. Le bilan est «bien plus important» que celui donné par les officiels, disent-ils. Trois morts, selon le ministère de l'Intérieur, au moins six, selon des ONG sur place. Cette montée au créneau des dirigeants politiques de l'opposition qui sont menacés dans leur intégrité physique au moment où le calme serait revenu même à Port-Gentil, un fief de Pierre Mamboundou, relancerait-elle la violence ? «Le calme est apparent, précaire. Quelque chose peut se passer à tout moment», déclarent ces responsables. Le jour de l'investiture du président élu Ali Bongo avec plus de 41% des voix ? Possible. ET SI LA SITUATION DÉGÉNÈRE... Nicolas Sarkozy qui a adressé ses «félicitations» et «vœux de succès» au fils du défunt Omar Bongo sans attendre les résultats des recours déposés par ses rivaux à la présidentielle, pourrait être tenté de «jouer» à visage découvert dans ce pays clé de l'influence de la France en Afrique. Surtout si le président officiellement élu demandait une aide. Ce ne sera pas la première fois. En 1990, François Mitterrand avait ordonné à ses soldats stationnés au Gabon de réprimer les manifestants qui avaient voulu ébranler le pouvoir du président Bongo, à Port-Gentil. L'opposition française met en garde l'Elysée contre toute «ingérence». Sera-t-elle entendue ? Pas sûr. Son appel pourrait connaître le même sort que celui réservé par Libreville à la proposition de Jean Ping, l'actuel président de la Commission de l'Union africaine et l'ancien ministre gabonais des Affaires étrangères : l'envoi de Moustapha Niasse, l'ancien Premier ministre sénégalais, pour jouer les médiateurs entre le candidat élu et les opposants qui contestent les résultats. A défaut d'un envoyé spécial, l'Union africaine qui gère déjà plusieurs situations conflictuelles, exhorte les dirigeants politiques à faire preuve d'un «sens élevé des responsabilités» et à œuvrer pour l'approfondissement du processus démocratique, le développement économique et le renforcement de la cohésion sociale de leur pays.