C'est à la fin des années 90 que la presse en ligne a vu le jour. Selon l'attaché de recherche à l'université de Nice, Samir Ardjoun, cette émergence est le résultat d'une réalité sociologique marquée par une crise sécuritaire. Au forum, hier, d'El Moudjahid, consacré à l'information à l'ère du numérique, le chercheur a assuré que cette presse en ligne ciblait, en particulier, les Algériens qui ont émigré à l'étranger pour fuir la situation sécuritaire à cette époque. « La presse francophone était plus à l'aise que l'arabophone qui se cherche encore aujourd'hui. D'ailleurs, la presse en ligne francophone algérienne n'a fait que copier sur des modèles français », indique-t-il, soulignant que les quotidiens El Watan, El Khabar, Echaab et Horizons sont les précurseurs de cette presse. Mais bien qu'elle soit très lue, surtout par la diaspora, la presse électronique algérienne ne répond pas, toujours d'après M. Ardjoun, aux normes internationales. Et pour cause, « l'environnement des technologies de l'information et de la communication (TIC) dans notre pays est encore basique tandis que le taux de pénétration du Net est encore faible. C'est ce qui ralentit l'épanouissement de la presse en ligne algérienne », note-t-il. A cela, s'ajoute la conception architecturale et graphique très simpliste des sites des journaux en ligne. « Ces sites sont dépourvus de toute profondeur sémiologique et les pages d'accueil sont anodines, dérisoires », constate-t-il, signalant que la presse électronique chez nous manque des techniques du savoir-faire. Il estime, toujours dans ce contexte, que les journaux en ligne ne font que plagier les versions en papier et ce, à cause de l'absence d'une stratégie globale d'expansion de ce type de support. Et pour ne rien arranger, cette presse est menacée par des sites d'information privés gérés par des amateurs qui n'ont suivi aucune formation dans l'information et la communication. L'attaché de recherche de l'université de Nice pense qu'il faudra 25 ans pour que l'Algérie soit à l'actualité en matière d'évolution numérique. « L'Algérie est classée 120e sur 143 pays en matière d'avancement numérique. 17,9 % seulement de la population ont accès au Net dont 09% via la 3G. Elle est classée, en outre, à la 115e place dans l'utilisation des réseaux sociaux », rappelle-t-il. Le professeur à l'université de Bejaia, Aïssa Merah, assure, quant à lui, que les sites de journaux en ligne sont très fréquentés même s'ils ne répondent pas aux normes. « Les contenus de la presse en ligne sont non seulement partagés, mais aussi commentés. C'est ce qui permet une interactivité entre le lecteur et le journaliste. Chose que la presse en papier n'a pas », fait-il remarquer, constatant, également, qu'il y a plus de liberté dans la presse électronique et moins de censure et d'autocensure. Cela ne signifie pas, pour autant, d'après lui, que cette presse représente une menace pour les journaux en papier. Les deux modèles peuvent être complémentaires et non concurrents. « Cela dépend, au fait, du modèle économique adopté. Mais la presse en papier n'est pas en danger à mon sens. Beaucoup de lecteurs utilisent la presser en ligne pour choisir les titres de journaux en papier à lire », relève-t-il.