Le Parlement basé à Tripoli (Congrès général national, CGN), mis en place par Fajr Libya, un groupe armé qui s'est emparé de la capitale l'an dernier, a décidé de suspendre sa participation aux négociations qui se déroulent actuellement à Skhirat au Maroc. Selon son porte-parole, Omar Houmaidan, le projet d'accord - que leur a proposé Bernardino Leon - ne comprenait pas des amendements fondamentaux qu'ils lui ont présentés. Fajr Libya a aussi émis ses réserves. Selon ce groupe, l'accord trahit « le sang des martyrs » versé pour « la libération de la Libye et la préservation de sa souveraineté ». A Tripoli, même la rue semble réticente. Des dizaines de personnes ont manifesté, mercredi dernier, devant le siège du CGN pour s'opposer à ce texte et brûler les photos de l'émissaire onusien. Le CGN pourrait se réunir demain pour décider de l'« avenir » de cette mouture portant sur le rétablissement de la paix entre les « frères ennemi ». Principales propositions : outre la formation d'un gouvernement d'union nationale pour une durée d'un an et dirigé par un Premier ministre et deux adjoints et la tenue de nouvelles élections, il y a le pouvoir législatif qui serait attribué à la chambre des représentants qui s'est réfugiée à Tripoli. Une seconde chambre, appelée Conseil d'Etat est prévue. Elle serait forte de 120 membres, dont 90 seraient issus du CGN. Le gouvernement reconnu par la communauté internationale, qui est « prêt en principe à signer la proposition d'accord », a repris, jeudi dernier, avec le médiateur onusien, malgré l'absence de la délégation de Tripoli, les négociations « dans une ambiance optimiste », selon Samir Ghattas, porte-parole de la mission de l'ONU en Libye. Un délai a été accordé au CGN. Selon Abu Bakr Mustafa Baira, du comité de dialogue du Parlement de Tobrouk, « il a été décidé, au cours des discussions d'aujourd'hui (jeudi, ndlr), d'accorder un délai au CGN pour signer le projet d'accord politique ». Les représentants du Parlement de Tobrouk, des délégués indépendants et des représentants de la société civile, présents à la table des négociations, ont, pour leur part, appelé, dans un communiqué diffusé, hier, leurs rivaux à « rejoindre tout de suite » la table des négociations et « à assumer leur responsabilité devant le peuple afin que le conflit soit réglé par le dialogue politique ». Bernardino Leon appelle, lui aussi, la délégation de Tripoli à rejoindre les pourparlers « la semaine ou les jours prochains ». Les 15 pays membres du Conseil de sécurité exhortent les factions libyennes à s'accorder sur un gouvernement de transition et à signer le projet d'accord proposé par l'ONU « dans les prochains jours ». Un gouvernement d'union « est dans l'intérêt du peuple libyen et de son avenir, afin de mettre fin aux crises politique et sécuritaire et de faire face à la menace croissante du terrorisme », écrivent les « quinze » dans une déclaration. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne ont également appelé les deux Parlements rivaux qui ont eu dimanche dernier pour la première fois des pourparlers directs à Skhirat, à l'accepter. « Nous considérons que ce document est réfléchi, une base équilibrée pour un accord qui répond aux attentes urgentes du peuple libyen et assure l'unité de la Libye », ont ajouté ces pays qui viennent de découvrir que les groupes terroristes qui écument le Sahel sont alimentés en hommes et en armes à partir du sud de la Libye devenu, depuis la chute de Kadhafi, un « incubateur du terrorisme » dans la région et une « base-arrière » pour les attentats de Daech.