Technologie en pleine expansion, les logiciels de blocage des publicités sur internet suscitent un débat au sein des professionnels de la publicité et des contenus sur le net. Décriés par des éditeurs de contenus, les logiciels antipub sont en nette progression au sien de la communauté des internautes de plus en plus dérangée par les intrusions de la publicité. Examiné par de nombreuses études, le comportement des usagers de l'internet tend, en effet, à laisser poindre une certaine exaspération, comme le note le site du quotidien économique français lesechos.fr, dans un papier mis en ligne en décembre dernier où l'on apprend que selon « une étude de la société Mozoo, elle-même positionnée sur la publicité mobile, et de l'institut de sondage OpinionWay, réalisée auprès de 1.006 personnes majeures », que « 78 % des Français estiment que la publicité sur Internet est une nuisance. » Ces statistiques viennent ainsi confirmer un changement de paradigme pour les professionnels de la publicité et les éditeurs de contenus sur le net qui doivent s'adapter à cette nouvelle donnée. Parmi les principales motivations avancées par les personnes interrogées, le site attribue « la faute à des formats jugés intrusifs et à une préoccupation de plus en plus forte sur les données personnelles », en rappelant que le constat est valable pour toutes les tranches d'âge : « 71 % des 18-24 ans jugent la publicité en ligne dérangeante, contre 84 % des plus de 65 ans ». Les professionnels ont également pris note de ce phénomène de rejet de la publicité, comme le confirme, sur lesechos.fr, le président de l'Interactive Advertising Bureau (IAB) France, regrettant que toute la communauté professionnelle « du marché paie les pratiques condamnables de quelques sites peu scrupuleux, qui n'hésitent pas à adopter des formats très intrusifs, où le son se déclenche automatiquement, où il faut cliquer plusieurs fois pour quitter une publicité ». Les technologies de blocage s'étendent, par ailleurs, à l'ensemble des supports de connexion à internet, y compris les terminaux mobile, notamment les téléphones portables. Cependant, sur ce terrain aussi, la « révolte » des usagers commence à prendre, comme le souligne le quotidien économique français lorsqu'il écrit que « les jeunes, qui plébiscitent l'Internet mobile se montrent particulièrement exaspérés par la publicité sur leur Smartphone : 47 % des 25-34 ans estiment que la publicité mobile est la plus dérangeante ». Le principal motif de ce mécontentement est lié au fait, selon les sondés, que « les formats développés sur mobile perturberaient la navigation et seraient difficiles à faire disparaître », rapporte lesechos.fr, ajoutant que parmi les autres considérations invoquées lors de l'enquête de terrain, « seuls 7 % jugent que les contenus de ces publicités ne sont pas en rapport avec leurs habitudes de consommation ». Devant le développement des pratiques publicitaires sur internet et les conséquences sur la navigation et la sécurité des données personnelles, se sont développés des outils technologiques destinés à bloquer les publicités et à les filtrer au bon vouloir de l'internaute, mais aussi, disent certains spécialistes, des entreprises qui acceptent de payer pour échapper au filtrage. Après avoir légiféré sur les publicités en pop-up, dites intrusives, les pouvoirs publics de par le monde, et notamment en Europe, n'ont pas réussi à faire diminuer les publicités intrusives. Le site du journal suisse www.letemps.ch, rappelle que « les pop-up ont beau avoir quasiment disparu, la publicité demeure invasive pour de nombreux internautes ». Il série une liste de formats et de pratiques à travers lesquels la publicité envahit l'espace de l'internaute au point donc de susciter ce « retour de manivelle », beaucoup de solutions ont été proposées pour aider les usagers à filtrer les contenus publicitaires, mais c'est incontestablement Adblock Plus, dont le journal suisse dit qu'elle « fait beaucoup parler d'elle depuis plusieurs jours. Accusée par des éditeurs de presse allemands de les priver de certains revenus, soupçonnés par certains de collusion avec Google, la société allemande Eyeo est au cœur d'une polémique qui dure ». Cette société est, en effet, sous les feux des projecteurs pour différents motifs. Le site www.presse-citron.net a passé en revue le businesse de la société pour se rendre compte, en s'appuyant sur une étude réalisée à l'université Simon Fraser en Colombie-Britannique que, effectivement, « en installant un logiciel de blocage de publicités, il est possible de réduire l'usage de la bande passante de 25 %. Cette réduction peut même atteindre 40 % lorsqu'on regarde des vidéos en streaming ». Il est également reproché à Eyeo de pratiquer des mesures à géométrie variable et surtout de monnayer son système de blocage, comme le souligne presse-citron.net sur lequel on peut lire qu'« Adblock Plus ne bloque pas toutes les publicités. Récemment, le Journal du Net évoquait une révélation du Financial Times, selon laquelle, courant février, Microsoft et Taboola auraient payé l'entreprise pour qu'elle intègre leurs publicités dans la liste blanche. Et très récemment, le spécialiste des recommandations de contenus Outbrain serait aussi passé à la caisse ». D'autres griefs sont formulés contre le système Adblock Plus, mais ces derniers temps, les analystes focalisent essentiellement sur les retombées économiques induites par le blocage des publicités en ligne, notamment sur l'économie des éditeurs et producteurs de contenu. Le débat sur l'apport de la publicité à l'économie générale du réseau internet a été relancé à la faveur d'une récente étude largement reprise par la presse spécialisée, et notamment le site lesechos.fr qui rapporte que d'après « le dernier rapport publié par PageFair et Adobe, le phénomène du ad blocking pourrait leur coûter près de 22 milliards de dollars de revenus perdus en 2015. Soit environ deux fois plus que l'an dernier (11,7 milliards) ». Un autre quotidien économique français latribune.fr retient de l'étude que « les sites web dépendant de la publicité en ligne pourraient perdre jusqu'à 41 milliards de dollars en 2016 », du fait, explique-t-il, de « l'utilisation croissante de bloqueurs de pub par les internautes » qui fait courir, d'après le rapport publié, « une menace existentielle pour l'avenir des contenus gratuits sur internet ». La presse relève, en effet, le fait que les utilisateurs de cette technologie sont de plus en plus nombreux, augmentant de plus de « 41% sur les douze derniers mois pour atteindre 198 millions, d'après l'étude, réalisée par l'éditeur de logiciels américain Adobe et la société irlandaise PageFair, spécialisée dans la récupération de ces revenus perdus », lit-on sur le site latribune.fr. Même constat pour d'autres titres de la presse internationale, à l'instar du site lesecshos.fr qui voit que « les internautes sont toujours plus nombreux à s'équiper de logiciels permettant de cacher la publicité sur Internet. Ils seraient, selon l'étude, 200 millions à utiliser de façon régulière un tel « ad blocker », dont un peu plus d'un tiers pour la seule Europe (77 millions). Et le journaliste de ce site de préciser qu'en moyenne, « le taux de pénétration de ces logiciels dépasse les 30 % », en donnant comme exemple la Grèce qui « détient la palme des ad blockers avec 37 % d'internautes utilisateurs », écrit-il. Certes, le phénomène est encore loin d'être massif et ne toucherait, que « 6 % des internautes dans le monde », d'après latribune.fr qui ajoute néanmoins que « les pertes estimées pèsent 14 % des dépenses publicitaires mondiales en ligne », en mettant notamment l'accent sur « les sites de jeux vidéo, liés aux thématiques high-tech et les réseaux sociaux » qui seraient « les plus touchés par le phénomène ». Mais cela semble se propager et toucher d'autres contenus, à l'instar des vidéos soumises également au filtrage, comme le regrette un cadre de chez Adobe, disant que « ce qui inquiète le plus les diffuseurs et les annonceurs sur le Web, c'est que les vidéos, qui sont un contenu à forte valeur ajoutée, commencent, elles aussi, à être bloquées ». Le site lesechos.fr, qui rapporte ces propos, croit savoir que le phénomène est facilité par le navigateur Chrome de Google qu'il voit « comme étant l'un des principaux moteurs de croissance du ad blocking car les logiciels y seraient plus faciles à installer ». Ce qui laisse penser que le blocage de la publicité risque de s'étendre aux autres supports mobiles. En effet, pour l'heure, il touche « essentiellement l'internet fixe (PC) : seules 1,6 % des publicités bloquées l'ont été sur des mobiles, alors que les logiciels étaient jusque-là peu adaptés aux smartphones », relève lesechos.fr qui craint que « le pire resterait à venir », convaincu qu'il est que « la donne devrait changer dans les années à venir ». Un constat identique sur le site du quotidien économique français latribune.fr. « Les consommateurs peuvent déjà utiliser des logiciels de blocage de publicité sous forme d'extensions qui s'ajoutent à leur navigateur internet », note-t-il, prévoyant, pour un proche avenir, « un outil similaire devrait être intégré plus tard cette année dans la prochaine version d'iOS, le système d'exploitation de l'iPhone et de l'iPad d'Apple ». En plus des différentes critiques faites aux logiciels de blocage de la publicité sur internet, il y a les attaques en justice, notamment par les éditeurs de contenus en Allemagne. Les derniers chiffres mettent l'accent sur les retombées prévisibles sur le fondement même du réseau internet, c'est-à-dire la gratuité des services et des contenus. Les rédacteurs du rapport PageFair et Adobe sont convaincus que « le blocage de publicité représente maintenant une menace existentielle pour l'avenir des contenus gratuits sur internet », note le site latribune.fr qui confirme de son côté que la « pratique peut handicaper les sites internet qui dépendent des recettes publicitaires, surtout s'ils offrent leurs contenus ou leurs services gratuitement ». Patron de PageFair, site dédié à la lutte contre les logiciels de blocage de la publicité, Sean Bleachfield, trouve dramatique, voire même « tragique que les utilisateurs de bloqueurs de publicité infligent par inadvertance des milliards de dollars de pertes aux sites internet qu'ils aiment le plus », lance-t-il sur latribune.fr, ajoutant qu'au moment où « le blocage des publicités s'étend au mobile, il y a une grande menace que le modèle d'activité qui a soutenu internet pendant deux décennies s'écroule ». Partenaire avec lui dans l'élaboration de ce rapport, Campbell Foster, patron du marketing produit chez Adobe, comprend, pour sa part, le développement de logiciels de blocage : « Les consommateurs, pour la plupart, acceptent le compromis qui vient avec la gratuité (en ligne) - je vous donne des informations sur moi en échange de vos séries télévisées, films, article de presse, services -, mais cela s'arrête avec la publicité qui est intrusive, ennuyeuse, pas pertinente ou simplement fait peur », analyse-t-il sur le même site.