L'Europe en rangs désunis est confrontée à la question lancinante de la migration. Pour la chancelière allemande, Angela Merkel, qui s'apprête à accueillir jusqu'à 750 000 réfugiés en 2015 (contre 203 000 en 2014), le fléau se posera avec acuité « bien plus que la Grèce et la stabilité de l'euro », Merkel, qui se dit « extrêmement insatisfaite », met le doigt sur la plus grave crise migratoire jamais vécue depuis la Seconde Guerre mondiale, en l'absence d'une solidarité ou, au minimum, d'une riposte commune. En juillet, un nombre record de candidats à l'éden européen a été enregistré. Il a triplé par rapport au même mois de l'an dernier pour franchir, pour la première fois, la barre des 100 000, selon l'agence européenne Frontex, chargée d'organiser la coopération des pays membres dans ce domaine. C'est majoritairement à partir des côtes grecques de la mer Egée (en particulier Lesbos, Chios, Samos et Kos) que les nouveaux desperados, fuyant la guerre en Syrie, en Irak et en Afghanistan, tentent de rejoindre le Vieux- Continent. Athènes, laminé par la crise économique, et dans une moindre proportion l'Italie, supporte en solitaire le lourd fardeau de la déshérence humaine. Entre le 1er janvier et le 14 août 2015, près de 160.000 migrants sont arrivés par la mer en Grèce, auxquels il faut ajouter 1.716 arrivées par la terre, via la frontière gréco-turque. Si l'Onu a exhorté les autorités grecques à tout faire pour apporter son aide, l'engagement de l'Union européenne, qui a pourtant annoncé, vendredi dernier, un soutien financier à la Grèce, se fait toujours attendre. « C'est une situation d'urgence pour l'Europe, demandant à tous les pays membres de l'UE d'apporter leur soutien aux autorités nationales qui accueillent massivement des migrants à leurs frontières », a souligné le directeur de Frontex, Fabrice Leggeri. Le signal d'alarme a été tiré par le HCR, appelant à un renforcement d'« urgence » des structures dans les îles et le reste du pays, la mise en place d'une « structure unique chargée de coordonner la réponse d'urgence » et d'un « mécanisme d'assistance humanitaire adéquat ». Car l'île touristique de Lesbos est proche de la « rupture » : 2.000 arrivées par jour, selon l'ONG International Rescue Committee (IRC), pas d'aide alimentaire, ni logement. Face au drame des migrants, toute l'Europe, emmaillotée dans la vague des 340. 000 migrants arrivés depuis le début 2005 (en augmentation de 175%par rapport à l'année dernière), est concernée par la gestion d'une crise majeure, malheureusement dénaturée par le distinguo entre les « réfugiées politiques », ouvrant droit à l'asile, et les « migrants économiques » jugés indésirables. « Ce que nous devons faire (...) est d'organiser notre système afin d'affronter ce problème d'une façon décente, civilisée et européenne », a déclaré, le 14 août dernier, le commissaire européen à l'Immigration, Dimitris Avramopoulos, lors d'une conférence de presse à Bruxelles, évoquant le principe fondateur de l'Union européenne, construite sur « la solidarité avec ceux qui sont dans le besoin ». En leader incontesté, l'Allemagne se taille la plus grande part des réfugiés, revue à la hausse. Elle a accueilli, à elle seule, 32,2% de l'ensemble des demandeurs d'asile arrivés dans l'UE, selon des statistiques d'Eurostat, établies en 2014. Le couple franco-britannique veut, par contre, cadenasser Calais du côté français de la Manche par un accord appelé à être signé, jeudi, par le ministre français de l'Intérieur et son homologue britannique, Theresa May.