Le pédagogue Ahmed Tessa vient de publier un livre* sur la faillite du système scolaire, où il met en exergue la réalité linguistique en Algérie. Dans cet ouvrage, l'auteur nous conduit, selon la préface signée par Amine Zaoui, « plus loin, plus profond, en accusant toute la classe politique responsable de cet échec d'intelligence qui a engendré des retombées mortelles sur la culture et sur la nouvelle génération d'intellectuels algériens ». Ahmed Tessa ne fait pas dans la critique pour la critique. L'opus est le fruit d'une longue expérience, d'une vie entière consacrée à la recherche, à l'enseignement. Ce livre est « intelligent » de par le traitement d'un sujet, toujours d'actualité. Ahmed Tessa explore et dénonce avec audace la précipitation avec laquelle fut menée la politique d'arabisation à partir de 1981. Dans cette optique, il livre des extraits de déclarations de plusieurs spécialistes comme Madoui, enseignant chercheur à Paris, Jean-Marie Bressand, fondateur de la revue « Le monde bilingue », Mohamed Lakhdar Maougal, maître de conférences et chercheur associé au Cread, le défunt Tahar Kaci, ancien cadre à l'éducation nationale, Farid Benramdane, universitaire et chercheur au Crasc ou Khaoula Taleb Ibrahimi, professeur en sciences du langage. Cette dernière a qualifié la politique d'arabisation de « chauvine, brouillonne et déconstruite ». Selon elle, « la sacralisation de cette langue pose problème partout ailleurs ». Quant à la langue française, elle dira qu'elle « a marqué le paysage langagier algérien, mais force est de constater que cette langue devenue étrangement algérienne. Nous assistons à un hiatus entre le monde de la formation, globalement arabisé, et le monde professionnel et économique, indéniablement francisé, ce qui a empêché l'émergence d'une intelligentsia algérienne au service du développement du pays ». Ahmed Tessa parvient sans difficulté à susciter des questionnements fondamentaux. Selon certains critiques, ce livre incite les instances politiques à reconsidérer l'institution scolaire. Avec des graffitis sur un mur d'un quartier populaire, la couverture du livre n'est pas néanmoins réfléchie. Dans la troisième partie, l'auteur présente, avec soin et minutie, une synthèse de quelques rapports établis par le ministère de l'Education nationale. Chaque année, ils analysent les résultats enregistrés aux examens de fin de cycle. Ils soulignent les avancées, les reculs et les points noirs dans les moyennes par discipline. L'œuvre d'une lecture aisée est truffée de suspens et après chaque ligne, les limites de la curiosité sont repoussées. Ahmed Tessa décortique le réel et se révèle porteur d'une vision de pédagogue éclairé. Ancien normalien, il a exercé dans tous les cycles du système scolaire. Fondateur de la première revue d'éducation bilingue en Algérie « L'école & la vie » (1992-1998), il a collaboré aux rubriques « Education » de plusieurs revues et journaux algériens, dont « El Watan » et présentement « El Khabar ». Il participe également à des émissions éducatives radiophoniques dans les trois langues. Il a déjà publié en autoédition deux ouvrages : « Le bouquet numérique de la scolarité » en 2011 et « L'éthique éducative au service des élèves » en 2012.