« Elle sera bientôt achevée. Le haut commandement de l'ANP va annoncer officiellement la clôture de cette opération lancée depuis l'indépendance lorsque la dernière mine antipersonnel sera annihilée », a indiqué, hier, le représentant du ministère de la Défense nationale (MDN), le lieutenant-colonel Ahmed Adami, au forum d'El Moudjahid à l'occasion de la Journée internationale des victimes des mines antipersonnel. L'officier supérieur de l'ANP a présenté un exposé sur l'opération de déminage entamée en 1963. Selon des estimations, il a été recensé plus de 10.883.300 mines antipersonnel disséminées le long des frontières au niveau des lignes Challe et Morrice (2.531 km) dont 3.745.300 à l'est du pays. La mission n'était pas facile car les cartes détenues par les autorités françaises étaient inutiles et sans efficacité puisque le déminage a commencé en 1963 sans cartes jusqu'à l'année 2007. Le représentant du MDN a mis en avant le professionnalisme et l'engagement des unités de l'ANP. « Les équipes du génie civil de l'ANP ont réussi à localiser les mines et ont procédé à la destruction de plus de 8 millions de mines. Depuis l'année 2004, aucune victime dans les rangs des militaires chargés de cette opération n'a été déplorée. Le haut commandement de l'armée a également procédé à la formation à l'étranger des officiers et sous-officiers dans le contrôle des terres dépolluées avant leur livraison », a précisé le lieutenant-colonel Adami. Selon le rapport du MDN, 7.819.120 de ces mines ont été extraites et détruites de 1963 à 1988 et plus de 50.000 ha de terres assainies livrées et 6.000 mines du stock ont été gardées pour les besoins de l'entraînement. En outre, 840.081 autres mines ont été détruites à partir du mois de novembre 2004. « Cette deuxième étape a été lancée officiellement par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, dans la cadre de la mise en œuvre de la convention d'Ottawa relative à l'interdiction des mines. Les résultats obtenus sont satisfaisants et reflètent l'engagement de l'Algérie », a assuré l'officier supérieur. En chiffres, les démineurs ont procédé à la destruction de 13.542 mines en 2016 avec une baisse sensible par rapport à l'année 2010 ou près de 94.000 mines ont été détruites contre 92.000 en 2008. « Cette baisse est le résultat des opérations d'assainissement menées », a-t-il expliqué. Certains tronçons notamment à Oum T'boul à l'est et à Naâma à l'ouest nécessitent un assainissement et un contrôle. 37 communes ont été dépolluées à 100% dont Tébessa, Tlemcen et Béchar. « L'opération est toujours en cours à Naâma, El Tarf, Guelma, Souk Ahras. Car on insiste sur la dépollution finale avant la livraison des terres aux autorités pour leur exploitation dans le domaine agricole », a-t-il ajouté. Vers la création d'une banque de données des victimes Dans son intervention, le président de l'Association nationale des victimes des mines antipersonnel, Mohamed Djouadi, a annoncé que son association travaille en coordination avec les ministères des Moudjahidine et de la Solidarité nationale pour recenser toutes les victimes de la « bataille silencieuse », en réponse à une question sur le nombre de victimes. Il a indiqué que les victimes perçoivent une allocation octroyée par le Trésor public. « L'Algérie est le seul pays parmi 163 pays touchés par ce fléau dont 22 pays arabes à octroyer une allocation aux victimes. » Tout en saluant les efforts de l'ANP, il s'est félicité que les opérations de déminage engagées depuis 2011 n'aient fait aucune victime. Mohamed Djouadi, lui aussi victime d'une explosion d'une mine antipersonnel durant la guerre d'indépendance, a saisi la présence de députés au forum pour lancer un appel aux membres de l'APN « pour la prise en charge de ce dossier épineux ». « Les victimes sont également les terres agricoles, les eaux souterraines. Il faut exiger des indemnités à la France même par un dinar symbolique. » L'avocate chargée du dossier, Me Fatima Benbrahem, a souligné que le crime continue et qu'il est nécessaire d'appliquer la règle du « pollueur payeur ». L'avocate a estimé que la France doit assumer ses responsabilités et prendre en charge les victimes. Un avis apprécié par Abdelkader Drissi, victime d'une mine antipersonnel, qui lui a coûté l'amputation de ses deux bras. Titulaire d'un master sur la convention Ottawa, il revendique ce droit à l'indemnité.