Photo : Slimene S.A. A vrai dire, le ver était dans le fruit. L'attelage était quelque peu branlant d'autant plus que des voix s'étaient déjà élevées, bien avant la première marche, pour récuser une prééminence du RCD crédité d'une volonté manifeste de récupérer les manifestations. Les termes du procès sont désormais clairement établis. «Nous craignons la manipulation, l'instrumentalisation et la récupération des jeunes», disent ceux qui ont décidé de ne plus recourir à la marche. Samir Laribi du collectif des chômeurs évoque sans hésiter «une tentative de caporalisation du RCD et le recours à une marche tous les samedis courant ainsi le risque d'usure et de lassitude». Le RCD a décidé de faire cavalier seul, assumant ses convictions et responsabilités. Des interventions sur la toile notamment, devenue un forum à ciel ouvert, se partageaient entre ceux qui jugeaient indispensable et inévitable l'implication des partis et ceux qui y voyaient le plus sûr moyen de décrédibiliser la démarche. La majorité penchait nettement pour cette dernière analyse. Le parti de Saïd Sadi a beau expliquer qu'il n'est qu'un partenaire parmi tant d'autres dans la Coordination, ceux qui l'accusent de faire cavalier seul et de vouloir récupérer la mise sont revenus à la charge. «Nous ne sommes pas le seul partenaire du mouvement et nous avons toujours adhéré à des actions prises dans le cadre de la CNDC», se défend-on au sein de ce parti. Sa présence est pourtant perçue comme un handicap pour faire adhérer au mot d'ordre de marche. «Nous ne faisons pas une fixation sur le RCD qui n'est pas, d'ailleurs, le seul parti qui a adhéré à la CNDC. Dans notre vision, les partis doivent soutenir et non gérer les actions de la société civile qui est dans sa nature transaprtisane», explique M. Malaoui, responsable du SNAPAP. Le résultat est là. La Coordination nationale pour le changement et la démocratie paie le prix d'un cafouillage patent. Les deux marches ont montré que la Coordination était absente même pour les mots d'ordre et les slogans. Ceux qui se rangent dans le camp des opposants semblent incapables de dépasser cette tare rédhibitoire qu'est la division des rangs. On s'est encore montré incapable de se retrouver autour du mot d'ordre d'une simple marche. Dans de telles conditions, il est impossible, voire illusoire de proposer une alternative crédible pour les problèmes plus complexes que vit la population. Les mouvements qui regroupent plusieurs tendances à l'image des Aârchs, du MCB ou même du mouvement islamiste résistent difficilement aux tentations partisanes. Ils s'inféodent aux partis ou éclatent. En donnant naissance à deux entités, la première voulant ancrer le mouvement dans la sphère des associations, et l'autre jugeant nécessaire l'appoint des partis, la CNCD emprunte visiblement le même chemin. Privée du soutien des partis même affaiblis, seuls capables de faire sortir au moins des militants, la CNCD sans véritable prolongement dans la société semble se diriger tout droit vers le mur.