Des femmes et des enfants en bas âge sont de plus en plus nombreux à faire la manche, notamment dans les grandes villes malgré les dispositions de la nouvelle loi relative à la protection de l'enfance. Face à cette situation, la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH) a lancé un appel urgent aux autorités publiques compétentes pour agir contre l'exploitation des enfants, notamment les bébés, dans la mendicité. L'instance présidée par Me Farouk Ksentini a incité les pouvoirs publics à explorer les voies et moyens devant permettre de renforcer davantage l'aide et l'assistance concrètes, utiles et effectives, accordées à cette catégorie de personnes en détresse sociale, en conformité avec les conventions internationales et régionales ratifiées par notre pays, ainsi que dans le respect de la dignité humaine et des traditions séculaires de solidarité et de justice de la société algérienne. Les services de sécurité ont lancé, ces derniers jours, une vaste opération de lutte contre ce phénomène notamment dans les grandes rues de la capitale. Les brigades de protection des mineurs et de lutte contre la délinquance juvénile de la police et de la Gendarmerie nationale (GN) mènent des sorties sur le terrain, « mais nous sommes confrontés à des difficultés notamment l'absence de prise en charge efficiente pour manque de centres spécialisés pour l'accueil des enfants en cas d'arrestation de leurs parents. Nous nous contentons d'avertir », a déploré un gendarme de la brigade de protection des mineurs au niveau de la GN d'Alger. Le Réseau algérien pour la défense des droits de l'enfant (Nada) a estimé que l'action des services de sécurité est fortement saluée, mais il a plaidé pour une solution sociale et durable. « C'est bien de lutter contre l'exploitation des enfants, mais quelle est la réponse sociale à ce phénomène ? » 11.000 enfants utilisés dans la mendicité « S'il s'avère qu'il y a exploitation des enfants, la loi est claire mais qu'en est-il des familles nécessiteuses et livrées à elles-mêmes qui recourent à la mendicité pour subvenir aux besoins de leurs enfants ? Les enfants exploités doivent être protégés certes, mais aussi pris en charge et nourris notamment », a indiqué le président du Réseau, Abderrahmane Araâr, qui a révélé que le Réseau a déposé 100 plaintes au niveau du parquet d'Alger, mais sans aucune suite « en l'absence de structures de prise en charge des enfants. La lutte doit être menée sur les plans juridique et social, car la mendicité des enfants est une couverture dans certains cas à exploitation sexuelle », a-t-il mis en garde. En outre, le président de Nada a confirmé que les enquêtes ont fait ressortir que des enfants, notamment en bas âge, consomment des médicaments notamment des somnifères, ce qui constitue un danger sur leur santé. En ce sens, Nada a traité, à travers le numéro 3033 (numéro vert du Réseau), 889 affaires. A l'occasion, Abderrahmane Araâr a invité les pouvoirs publics à élaborer des textes exécutifs du code de la protection de l'enfance, notamment la création de structures et centres spécialisés dans la protection de l'enfance. Pour sa part, le président de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem), le professeur Mustapha Khiati, a insisté sur l'application rigoureuse de la loi, notamment le code de la protection de l'enfance qui prévoit, dans un de ses articles, des peines contre l'exploitation des enfants dans la mendicité. « Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Louh, a instruit les procureurs généraux pour s'autosaisir dans les atteintes contre les personnes notamment les enfants, à savoir les kidnappings, viols, assassinats et exploitation par des réseaux de mendicité, en particulier. Mais, concrètement, rien n'est fait. » Notre interlocuteur a préconisé de permettre aux associations concernées de se constituer partie civile dans les cas d'atteinte aux droits des enfants. « La police doit agir en permanence sur le terrain afin d'endiguer les fléaux sociaux et que cela ne soit pas occasionnel », a-t-il insisté. La Forem a recensé plus de 11.000 enfants exploités dans la mendicité en Algérie. Des peines d'emprisonnement et le retrait des enfants aux parents défaillants sont les mesures appliquées contre toute personne passible de manquement, selon l'article 95 de la loi modifiant et complétant l'ordonnance n°66-156 du 8 juin 1966, portant code pénal, qui prévoit « une peine de prison pour la mère qui mendie avec son enfant mineur ». La loi exclut cette dernière de toute poursuite judiciaire si sa situation sociale dégradée est prouvée.