Après trois mois d'existence, la toute jeune Autorité de régulation de l'audiovisuel (Arav) marque ses ambitions. La refonte totale du paysage de l'audiovisuel, dominé par le foisonnement de chaînes privées émettant en offshore, se légitime à la fois par l'état anarchique et les dérives vécues notamment dans le traitement des dossiers extrêmement sensibles des enlèvements et du « déchaînement moralement inacceptable » subi par la ministre de l'Education nationale, Nouria Benghebrit, victime d'une attaque planifiée prenant l'« allure d'un quasi-lynchage ». Voici donc venir le temps des clarifications et de la nécessaire remise en ordre pour réhabiliter le journalisme, rendu enfin à ses valeurs fondamentales de professionnalisme et d'éthique qui lui donnent toute sa noblesse. Le rappel cinglant du président de l'Arav, Zouaoui Benhamadi, traduit la déliquescence d'un secteur névralgique, du moins « certains médias (qui) ont pris une habitude qu'il faut corriger », particulièrement en matière de respect des règles et des principes universels d'exercice du métier d'informer. La jeunesse de l'Arav ne la dispense guère de la mission salvatrice et rédemptrice. Dans son intervention à la Radio Chaîne III, Benhamadi a clairement tracé les frontières légales et réglementaires d'une institution qui se refuse à toute forme de discrimination statutaire et au rôle ingrat de « gendarme » ou d'« arbitre ». Elle est conçue comme une « institution indépendante », pleinement consacrée par la volonté du président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Elle tire toute sa légitimité de « l'autorité de l'Etat qui s'exerce indépendamment du pouvoir exécutif et des autres formes d'orientations ou de pressions ». La mission de contrôle et de renforcement démocratique commande une remise en ordre « plus que nécessaire », annoncée dans les prochains jours, pour la normalisation de toutes les chaînes « mises sur un pied d'égalité » et appelées à se conformer au cahier des charges. « Les chaînes TV qui existent déjà vont devoir se conformer au cahier des charges et refaire ainsi le parcours pour devenir des chaînes à la fois légales et avec une adresse définie, tout en les soumettant aux lois du pays, que ce soit sur les plans économique, financier ou social », a précisé le président de l'Arav. Le temps de la rigueur a sonné pour stopper la dérive de nature à compromettre la riche expérience démocratique trahie par les pratiques condamnables de l'invective, des atteintes à la vie privée, de la diffamation et du non-respect de l'enfance, malheureusement érigée en fonds de commerce abject.