ver dans le marbre de notre histoire culturelle : Boudjemaâ El Ankis, Hassen Saïd et Amar lachab, trois maîtres incontestés de la chanson Chaâbi, qu'on croyait fourvoyés à jamais dans les méandres de l'indifférence publique, sont fièrement dressés sur la même scène, forçant l'âge et le protocole, pour donner, mandole à la main, le LA à la cérémonie de clôture de la quatrième édition du Festival national de la chanson Chaâbi, qui s'est déroulée mardi dernier au Théâtre national algérien Mahieddine Bachtarzi à Alger. Fierté, le mot n'est pas le plus fort pour faire retentir toute la charge émotionnelle qui s'est emparée d'un public qui, ainsi, venait d'assister à l'une des plus belles expressions de notre patrimoine culturel. Mais au-delà des amours nostalgiques, des souvenirs ressuscités, souvent avec amertume, et des battements de coulpe, force est d'admettre qu'à travers ce grandiose festival, la chanson Chaâbi en sort, à bien des égards, gagnante. Dans le sens, cela ouvre grande la voie à tous, vraiment à tous, les amateurs de ce patrimoine musical, qui pullulent, partout dans le pays. Et pas seulement à Alger, à Blida ou à Mostaganem, où le Chaâbi a failli être une religion. Ainsi, tout en leur honneur, les initiateurs de ce festival ont mis fin à une vieille pratique, sournoisement discriminatoire, qui excluait du podium toute voix qui ne répondait à de vils critères sociogéographiques. Tout ce qui n'est pas algérois, n'est pas Chaâbi. Et Dieu sait combien sont nombreux de brillants interprètes qui ont fait les frais d'une pareille pratique. On se souvient toujours de grands maîtres du genre, tels regrettés Rachid Nouni, Cheikh Bourahla, et aujourd'hui Abdallah Guettaf, coupables de ne pas nicher dans la nébuleuse «algérophile», mais- heureusement- que le talent et le génie ont fini par imposer au lieu même où officient à ce jour les gardiens du temple ankaoui. Il aura ainsi fallu attendre une pareille occasion pour mettre sur les devants de la scène, une chanson Chaâbi nationale, riche en couleurs, en sons, en rythmes, où chaque région apporte, ne serait-ce qu' une toute petite tonalité.