Les Etats-Unis qui commandent les opérations militaires en Libye depuis le 19 mars, début de l'intervention militaire, refilent après plusieurs jours d'âpres négociations et de tractations, la chaude patate libyenne à l'Alliance atlantique. Au grand dam de Nicolas Sarkozy, qui lui redoute un retournement de l'opinion arabe et une perte de sa marge de manœuvre sur le terrain. «La coordination de l'intervention militaire doit rester éminemment politique, même si elle reposera sur la machinerie de l'OTAN» insiste-il. Au grand bonheur des lobbies atlantiques. Par ce transfert à partir de lundi ou mardi, ils réussiront à permettre à l'Amérique, sous le chapeau de l'OTAN, de garder la main sur le théâtre des opérations et de renvoyer aux calendres grecques le projet de défense commune européenne chère à la France. «Dès le début, le président américain Barack Obama, a souligné que le rôle de l'armée américaine serait limité dans le temps et la portée. Notre mission a consisté à utiliser les capacités uniques des Etats-Unis pour créer les conditions d'une zone d'exclusion aérienne et aider à répondre aux besoins humanitaires urgents» déclare la secrétaire d'Etat Hillary Clinton». «Nous passons à l'étape suivante : Nous avons convenu, de concert avec nos alliés de l'OTAN, de faire passer le commandement et le contrôle de la zone d'exclusion aérienne sur la Libye à l'OTAN. Tous les 28 alliés ont également autorisé les autorités militaires de mettre au point un plan d'opérations pour l'OTAN afin d'assumer la mission d'une plus grande protection des civils en vertu de la résolution 1973» précise t'elle. Comme consolation, Paris qui espère que l'opération prendra des «semaines» et «pas des mois», a réussi à éloigner de l'OTAN deux missions. Primo, le «pilotage automatique». Il sera assuré par un «groupe de contact» des pays participant aux opérations, y compris la Ligue arabe et l'Union africaine, dont la première réunion est prévue mardi prochain à Londres. Selon Alain Juppé, ce comité «rassemblera les Etats contributeurs» aux opérations, dont le Qatar et les Emirats pour ne pas être accusé d'interventionnisme occidental et définira «les orientations globales pour les actions». Pour combien de temps ? Quelques jours répondent les Américains précisant que l'«accord politique» conclu jeudi à Bruxelles entre les 28 membres de l'OTAN porte sur toute l'opération militaire et «pas seulement la zone d'exclusion aérienne». Pour eux et les autres membres de l'OTAN qui redoutent un enlisement, il ne saurait y avoir deux chaînes de commandement, d'où leur intention de continuer les discussions pour «élargir» le mandat de l'ONU. Selon des responsables américains, le commandement militaire de l'OTAN devrait superviser les opérations offensives et son organe politique, le Conseil de l'Atlantique Nord, devrait fournir les orientations générales. Deuxièment, les frappes au sol contre les cibles libyennes, menaçant les populations civiles, telles que des blindés ou des équipements militaires, toujours objet de controverse. Certains Etats européens, Allemagne et Turquie en tête, estiment que la zone d'exclusion aérienne étant créée, il n'y a pas lieu de poursuivre les frappes. A Washington, si les démocrates commencent déjà à reprocher au président Obama de lancer une troisième guerre dans un pays musulman après celles de l'Irak et de l'Afghanistan, les républicains lui réclament de préciser la nature de son commandement et sa stratégie de sortie et le coût de cette intervention au moment où le pays est enfoncé dans une dette abyssale.