Il y a quelques jours, à Deauville, lors du sommet du G8, les présidents américain et français se sont dits résolus à «finir le boulot» en Libye. Résultat des courses : le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, a annoncé hier, dans un communiqué, que l'Otan prolonge jusqu'à fin septembre sa mission en Libye, qui devait, officiellement, s'achever le 27 juin prochain. «Cette décision envoie un message clair au régime de Mouammar Kadhafi : nous sommes déterminés à poursuivre nos opérations pour protéger le peuple libyen», insiste M. Rassmussen sur un ton ferme. Toute prévisible, la décision de l'Alliance Atlantique fait suite aux pressions de plus en plus accrues, ces derniers temps, et les appels au départ du leader libyen. Un objectif qualifié mardi «du pire scénario» par le porte-parole du gouvernement libyen, au lendemain de la rencontre à Tripoli de Kadhafi avec le président sud-africain Jacob Zuma, chargé de la médiation africaine. Rencontre durant laquelle le guide libyen a exclu formellement son départ du pays, battant ainsi, en brèche les déclarations de certains responsables occidentaux prévoyant sa chute imminente. Pour M. Rasmussen, le départ du dirigeant libyen «n'est qu'une question de temps après l'extension de la mission de l'Alliance». «La question n'est pas de savoir si Kadhafi va partir, mais quand», a-t-il déclaré au cours d'une conférence à Bruxelles, en précisant que «les alliés et les partenaires (au sein de l'Otan, ndlr) ont fortement soutenu cet appel». Mardi, au cours d'une visite dans le fief de la rébellion à Benghazi, le chef de la diplomatie italienne, Franco Frattini, avait affirmé que le régime libyen était «fini». «Ses proches collaborateurs l'ont quitté, il n'a plus de soutien international, les leaders du G8 le rejettent : il doit partir», a-t-il insisté. L'UA ET LA RUSSIE ŒUVRENT POUR UN CESSEZ-LE-FEU L'hypothèse ne fait pas l'unanimité parmi les puissances mondiales. A l'image de la Russie qui entend manœuvrer sur les terres de l'Union Africaine (UA), pour parvenir à cessez-le-feu et le lancement de négociations de paix entre les deux parties. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a évoqué mardi un compromis entre le régime libyen et l'opposition. «Les éléments sur la base desquels un accord de cessez-le-feu pourrait être conclu pour lancer des négociations de paix prennent vraiment forme aujourd'hui», a déclaré M. Lavrov, cité par Itar-Tass, ajoutant que l'opposition libyenne «a reconnu la nécessité d'une participation de représentants de Kadhafi à des pourparlers de paix». L'opposition libyenne est «ouverte aux pourparlers, mais insiste pour négocier avec des personnalités neutres ou des technocrates du gouvernement». Elle est même «d'accord pour discuter avec des représentants des forces armées qui n'ont pas de sang sur les mains», poursuit le ministre. Le président de la commission de l'UA, Jean Ping, s'est dit, pour sa part, hier, favorable à la proposition de médiation russe tout en refusant que l'Afrique soit écartée des efforts de règlement du conflit. «Il y a eu la situation militaire (en Libye) et nous sommes passés à la recherche d'une solution politique et là nous avons une contribution», a souligné M. Ping lors d'une conférence de presse à Bruxelles à l'issue d'un entretien avec le président de la Commission européenne José Manuel Barroso. La sortie de M. Ping intervient au lendemain d'une conversation entre le président russe, Dimitri Mevedev, et son homologue sud-africain, M. Zuma, à propos de la visite de ce dernier à Tripoli. Les deux chefs d'Etat ont émis le souhait de coordonner les efforts entre l'UA, la Russie et l'Afrique du Sud, afin d'aider la Libye à retrouver le plus vite possible sa stabilité. M. Medvedev s'est félicité des efforts de l'UA en vue d'un cessez-le-feu en Libye et de créer le climat favorable au peuple libyen afin qu'il décide de l'avenir de son pays. Il s'est même dit prêt à dépêcher un émissaire à Tripoli, alors que le président en exercice de l'UA, le chef d'Etat de la Guinée équatoriale, M. Teodoro Obiang Nguema est attendu le 6 juin à Moscou pour une visite officielle de cinq jours.