Quinze chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres du Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'Union africaine dont M. Abdelaziz Bouteflika, représenté par M. Abdelkader Messahel, le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, se retrouveront aujourd'hui à Abuja, au Nigeria, qui préside le CPS pour le mois d'octobre 2009, pour discuter d'un rapport intitulé « le Darfour à la recherche de la paix, de la justice et de la réconciliation » élaboré par un panel de haut niveau de l'UA et des situations conflictuelles recensées sur le Continent. Sous le coup d'un mandat d'arrêt international, pour crimes de guerre et contre l'humanité au Darfour, en proie depuis 2003 à un conflit à l'origine de 300.000 morts selon les estimations de l'ONU - 10.000 d'après Khartoum - et de 2,7 millions de déplacés, Omar El-Béchir a préféré décliné l'invitation que lui a remise Kadhafi, le président en exercice de l'UA. Il se fera représenter par Ali Osman Taha, son deuxième vice-président. « Tous nos interlocuteurs au Soudan, à commencer par le président Béchir, ont insisté sur la nécessité que la justice soit rendue, de manière à être vue. C'est sur les moyens d'y parvenir que nous avons fait des recommandations, et nous espérons qu'elles seront acceptées » déclare avant ce sommet M. Mbeki. Jean Ping, le président exécutif de l'UA qui a reçu ce rapport le 8 octobre dernier à Addis-Abeba, exclut tout encouragement à l'impunité. Il insiste toutefois sur la nécessité d'un sursis au mandat d'arrêt de la Cour Pénal Internationale (CPI) de La Haye contre le président soudanais. « La quête légitime de la justice doit être poursuivie de manière à ne pas entraver ou compromettre la recherche de la paix. Il s'agit ce faisant d'articuler une approche globale qui permette à ces deux préoccupations d'être prises en compte » explique –t-il. Selon les deux responsables, la solution passerait par la création « d'une cour criminelle hybride » formée de juges soudanais et étrangers. Elle aura pour mandat le jugement des auteurs de crimes commis au Darfour. A contrario de Khartoum, le JEM (Le Mouvement Justice et Egalité) annonce son rejet du rapport des sages africains. Le mouvement rebelle estime que les crimes commis au Darfour doivent être jugés par la CPI. Cette position s'inscrit en porte à faux avec celle des sages qui recommande la mise en place d'un tribunal spécial avec des juges étrangers pour juger les personnes accusées d'atrocités au Darfour. Dirigé par l'ex-président sud-africain Thabo Mbeki, ce groupe de sages mis en place après l'appel lancé en Juillet 2008 par le Conseil pour la Paix et la Sécurité, ne cherche nullement à « blanchir » le président soudanais Omar El-Béchir, préviennent ses huit membres (les anciens présidents de l'Afrique du Sud, Thabo Mbeki, du Burundi, Pierre Buyoya, du Nigéria, Abdusalami Abubakar, et l'ancien ministre égyptien des Affaires étrangères, Ahmed Maher El Sayed). Le sommet qui appuiera probablement après des discussions l'approche, globale, inclusive et surtout soudanaise et africaine du panel, pourrait donner des recommandations au Conseil de sécurité pour de nouvelles décisions dont une relecture de la Résolution 1591 qui a imposé des sanctions contre le Soudan. « Si le gouvernement du Soudan agit pour améliorer la situation sur le terrain et faire avancer la paix, il y aura des incitations, s'il ne le fait pas, alors il y aura des pressions accrues imposées par les Etats-Unis et la communauté internationale » déclarait la semaine passé Barack Obama en déclinant sa nouvelle approche politique du plus vaste pays d'Afrique à l'approche de 18 mois décisifs pour le Soudan. Après les élections générales prévues en avril 2010, le pays doit régler la question du Sud. Après la guerre civile entre le Nord et le Sud qui s'est terminée en 2005 un référendum d'autonomie du sud est prévu en 2011. De l'avis de certains connaisseurs, ces élections et ce référendum pourraient aggraver l'instabilité au Soudan et de la région.