La 11e session de la Conférence de l'Union africaine s'ouvre aujourd'hui dans la station balnéaire égyptienne de Charm el Cheikh. Les conflits qui perdurent en Afrique ne laissent guère aux responsables politiques africains de se pencher sur les autres maux qui mettent le continent noir en marge du développement. Toutefois, le sujet principal qui dominera l'ordre du jour sera la question de l'eau et de l'assainissement. Cela, outre les conflits «traditionnels» et le nouveau casse-tête de la crise électorale zimbabwéenne à laquelle les chefs d'Etat et de gouvernement sont appelés à lui trouver une solution. Ce qui est loin d'être facile ni évident. Le ministre délégué algérien, chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, qui prenait part aux travaux préparatoires du Sommet a indiqué que l'eau et l'assainissement feront l'objet d'un large débat lors de cette 11e Conférence de l'Union africaine (UA) précisant: «Un thème particulier est traité lors de chaque session d'été», et de souligner, «les deux derniers sommets ont planché respectivement sur l'industrie et l'éducation en Afrique». L'eau est effectivement un thème central pour un continent qui en manque tant. Mais les responsables africains auront-ils l'aptitude d'approfondir le débat sur l'eau et l'assainissement et de prendre les décisions adéquates pour ce faire, quand les conflits qui perdurent en Afrique - empêchant le continent noir de se mettre à niveau - les interpellent tout autant: les crises et guerres qui secouent nombre de régions africaines (Somalie, Soudan, Tchad), dont la dernière en date est la «crise électorale» au Zimbabwé, relativisent ainsi les efforts consentis ces dernières années par les pays et les gouvernements africains pour assainir leur gouvernance, la remettre à niveau par la démocratisation des rapports entre les gouvernants et les populations. Cela a fonctionné dans certains pays africains qui ont su faire le bond qualitatif nécessaire à la promotion de la bonne gouvernance, devenant l'exemple à suivre. La «pâte» n'a pas, en revanche, bien pris ailleurs où l'on reste cramponnés sur la pensée unique et au concept de «l'homme providentiel». Le président zimbabwéen, Robert Mugabe, a même affirmé être un président de «droit divin». Ces péripéties «électorales» au Kenya, l'an dernier, au Zimbabwe, actuellement, disent combien les Africains ont encore à mettre leurs ouvrages sur le métier. La commission préparatoire du Sommet africain, faisant montre de prudence, avait, rappelle-t-on, laissé le soin aux chefs d'Etat et de gouvernement de donner la suite qui convient à la crise zimbabwéenne alors que la communauté internationale condamnait, comme «illégitime», la réélection de Robert Mugabe. Selon le ministre sénégalais des Affaires étrangères, Cheikh Tidiane Gadio, «toute la première séance du huis clos (de samedi) a été consacrée au Zimbabwe et les gens ont parlé très franchement de la gravité de la situation». Le chef de la diplomatie sénégalaise a ainsi expliqué que les membres du conseil des ministres étaient partagés, certains souhaitant, selon lui, «botter en touche» alors que d'autres cherchaient à «préparer les chefs d'Etat à la question en ayant toutes les informations en main». Se voulant optimiste, le président de la Commission de l'UA, le Gabonais, Jean Ping, a assuré vendredi soir - alors que les médias le pressaient de réagir à la situation au Zimbabwe - que «le problème du Zimbabwe, j'en suis convaincu, trouvera une solution crédible. Donnez-nous le temps d'en débattre avec nos chefs d'Etat, avec la Sadc». Cette dernière, qui s'est réunie jeudi et vendredi au Swaziland, n'a pas réussi, cependant, à trouver un consensus qui permette de déboucher sur une solution acceptable par les deux parties. Mais avant que les chefs d'Etat aient à connaître du contentieux zimbabwéen, celui-ci est pris en charge par le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'UA qui doit en débattre. C'est le président de l'Union africaine qui activa le CPS afin que soit étudié le cas du Zimbabwe et de proposer à la conférence africaine la ou les solutions qui s'imposent, en l'occurrence. Le CPS dont la mission est «promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité en Afrique» peut recommander à la Conférence (des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA, instance suprême de l'Union) «l'intervention dans un Etat membre dans des circonstances graves, à savoir les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l'humanité». Parmi ses prérogatives il y a celle qui consiste à «imposer (...) des sanctions chaque fois qu'un changement anticonstitutionnel de gouvernement se produit dans un Etat membre». Reste, certes, aux chefs d'Etat et de gouvernement présents à Charm el Cheikh d'apprécier si ce qui s'est passé au Zimbabwe est anticonstitutionnel et ouvre la voie aux sanctions prévues par le texte fondateur du CPS. La Conférence des chefs d'Etat africains qui s'ouvre aujourd'hui dans la station balnéaire égyptienne aura donc à trancher sur le cas du Zimbabwe. En marge de la conférence de l'UA, eurent lieu hier quatre Sommets, auxquels a pris part le Président Bouteflika, consacrés respectivement à la réunion ordinaire de la commission de redynamisation du Nepad, à la réforme de l'ONU, au Forum du Mécanisme africain d'évaluation par les pairs (Maep) de même que la réunion, déjà évoquée, des pays membres du Conseil de paix et de sécurité (CPS), dont l'Algérie est membre, qui devait plancher hier sur la crise zimbabwéenne.