Le Soudan, le plus grand pays d'Afrique, 39 millions d'habitants dont près de 20 millions d'électeurs potentiels, réussira-t-il à s'éloigner du spectre des divisions ? Les dirigeants du Congrès national, le parti au pouvoir et ceux du Mouvement de libération du Soudan (SPLM, ex-rébellion sudiste), sont parvenus après une série de réunions entre le président soudanais Omar el-Béchir et le dirigeant sudiste Salva Kiir, à deux accords. Le premier : sur l'introduction de réformes démocratiques avant les élections prévues en avril prochain, le premier depuis 1986 et le référendum sur l'indépendance du Sud prévu en janvier 2001. Le second : sur l'examen de la loi relative à la sécurité nationale et les renseignements pour parvenir à un accord qui sera soumis au Parlement « dans les 24 heures». «Nous annonçons un accord entre les deux partenaires sur tous les points qui étaient auparavant source de contentieux sur la loi relative au référendum dans le Sud-Soudan » déclare Nafie Ali Nafie, le numéro deux du Congrès national dans une conférence de presse conjointe avec Pagan Amum, le secrétaire général du SPLM. Selon ce dernier, les détails de cet « accord » seront annoncés après consultation de toutes les forces politiques du pays. Cet accord avant l'arrivée de Scott Gration, l'émissaire américain dans la capitale soudanaise, pour « apaiser les tensions entre le Nord et le Sud qui menacent l'accord de mai 2005 qui a mis fin à plus de deux décennies d'une guerre civile et provoqué la mort de deux millions de personnes » permet d'espérer une issue sans heurts aux élections prochaines. Y compris au Darfour, la province de l'ouest du Soudan en conflit armé depuis 2003. Thabo Mbeki, l'ancien président sud-africain, est depuis vendredi soir à Khartoum. Au nom du panel de haut niveau de l'Union africaine (UA) sur la crise au Darfour, il mène des entretiens avec les responsables soudanais (opposition et gouvernement). Objectif : évaluer l'application recommandations du rapport du panel adopté lors du sommet du Conseil de paix et de sécurité de l'UA (CPSUA) le 29 octobre au Nigeria. L'Union africaine qui refuse toute ingérence étrangère ou poursuite du président soudanais par la Cour Pénale internationale compte prendre elle-même en charge la question du Darfour. Au risque d'irriter Khartoum elle préconise la création d'une « cour criminelle hybride » formée de juges soudanais et étrangers pour juger les auteurs de crimes au Darfour. L'opposition appuie ce projet. Mustafa Osmane Ismaïl, un conseiller de Omar el-Béchir, estime que cette proposition « manque de clarté ». Le président soudanais qui est visé par un mandat d'arrêt de la CPI pour crimes de guerre et contre l'humanité finira-t-il par céder devant le panel des sages ? On sera plus édifiés après la tournée de Scott Gration au Soudan, la seconde en près de trois semaines et l'arrivée du diplomate nigérian Ibrahim Gambari à Khartoum pour prendre, dès le 1er janvier, la tête de la mission de maintien de la paix de l'ONU et de l'Union africaine (Minuad) au Darfour.