Le jeu du chat et de la souris entre l'Iran et le groupe des «six» sur le dossier nucléaire continue. Dangereusement. Mahmoud Ahmadinedjad, qui avait, début décembre, fixé fin janvier au groupe des «six» pour conclure un accord d'échange d'uranium à ses conditions, sans quoi il ordonnerait la production de l'uranium hautement enrichi, est passé à l'acte. Il a demandé hier à Ali Akbar Salehi, son chef de l'Organisation de l'énergie atomique, de «commencer à produire de l'uranium enrichi à 20%» avec les «centrifugeuses» iraniennes pour alimenter le réacteur de recherche médicale de Téhéran. La décision du président iranien de défier les «Six» (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne, Allemagne) pour un bras de fer, vingt-quatre heures après une rencontre entre Manouchehr Mottaki, le ministre iranien des Affaires étrangères, et Yukiya Amano, le patron de l'Agence internationale de l'énergie atomique, pour un « accord pas trop loin » et moins d'une semaine après sa disponibilité affichée à envoyer à l'étranger 70% de son uranium enrichi à 3,5%, car l'Iran n'a «pas de problèmes» pour accepter un éventuel échange, inquiète. Ahmadinedjad qui, le 1er décembre dernier, jugé la question du nucléaire iranien «réglée», après le vote d'une résolution à l'AIEA condamnant les activités nucléaires de Téhéran, a beau garder la porte «toujours ouverte» à un accord avec les «Six», particulièrement avec Barack Obama qui l'a fermement prévenu de se plier aux obligations de la communauté internationale, lors de son discours sur l'état de l'union, le dialogue semble quasiment plié. Samedi, le président du Parlement iranien, Ali Laridjani, proche du Guide de la république Ali Khamenei, avait déjà durci le ton. Il a accusé les Occidentaux qui lui ont demandé le 21 octobre dernier d'envoyer, en une seule livraison, 70% de son stock d'uranium faiblement enrichi en Russie et en France pour y être transformé en combustible pour son réacteur de Téhéran, de chercher à «tromper l'Iran» pour lui «enlever son uranium enrichi». Le lendemain, dimanche, il avait brandi la menace d'une réduction sérieuse de la coopération avec l'AIEA qui condamne Téhéran pour sa politique nucléaire. Les «Six» demanderont-ils à l'Iran qui dit ne pas avoir de «problème» pour un échange «inconditionnel» de son uranium de «traduire sa parole en actes» par une contre-proposition formelle à l'AIEA ou opteront-ils pour de nouvelles sanctions internationales ? Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et la France, qui ont vu, la semaine passée, l'Iran inaugurer deux lignes de production de missiles sol-air et sol-sol, procéder à un lancement d'une fusée spatiale sont sceptiques. Ils plaident pour des sanctions sévères. Certains analystes redoutent, comme le leader du Parti socialiste progressiste libanais Walid Joumblatt, l'installation d'un «chaos dans toute la région». Ali Akbar Salehi tente de rassurer. Un accord sur un échange d'uranium est encore possible, dit-il, même s'il reste «peu de temps». «Pour le moment, il y a un certain optimisme dans les discussions, car certains pays font des propositions raisonnables. Si les «Six» font des propositions avec des conditions déraisonnables, nous lancerons la phase d'enrichissement », dit-il sans donner plus de détails sur ce « peu de temps » et ces «conditions déraisonnables».