Le traitement de l'épidémie de la grippe A/H1N1 dans les médias a fait l'objet d'une conférence donnée jeudi à Alger par le professeur Patrice Bourdelais, historien et démographe français, spécialiste de l'histoire de la santé publique. Et contrairement à l'idée reçue, la réaction hypertrophiée des télévisions et journaux face à cette maladie, n'a pas seulement une origine mercantile. Elle repose aussi sur un socle historique. Pour ce professeur, le souvenir de l'épidémie de la peste noire, qui a décimé le quart de la population européenne au 14e siècle, et celle qui a ravagé la ville de Marseille en 1720, occupent toujours une place prépondérante dans le système de santé français. De même que la grippe espagnole qui a tué des millions de personnes entre 1918 et 1919 et qui a structuré l'imaginaire des Européens. Ces trois événements tragiques expliquent, selon lui, en partie, l'emballement de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), les médias et les pouvoirs publics face à la grippe porcine. « A l'époque, a-t-il indiqué, chaque ville disposait d'un correspondant qui demandait aux bateaux de quitter le port. En outre, des cordons sanitaires étaient dressés et des corps d'inspection sanitaires veillaient durant la période de l'épidémie. Les contraintes et les résistances faisaient que la libre circulation des personnes et du commerce étaient limitées d'où un système qui génère la peur contre l'autre », explique-t-il. « Pour la grippe A/H1N1, c'est un statut particulier », a observé le Pr Patrice Bourdelais. Et d'expliquer que depuis l'apparition du premier cas au mois d'avril 2009, l'OMS a calculé que pour un cas contaminé, cela entraîne deux malades comme la grippe espagnole avec un pic en automne, « ce qui explique l'alerte et l'emballement des médias ». Néanmoins, le salut est venu par le vaccin, estime-t-il. Alors, pour lui, ce qui structure les espoirs des hommes et des femmes justifie les décisions prises de deux manières. « L'accroissement de l'espérance de vie et le contrôle des maladies infectieuses », rappelle le conférencier.