La Commission européenne a décidé, vendredi dernier, de débloquer 80 millions d'euros à l'intention des pays frappés par l'épidémie de grippe aviaire, dont 35 millions seront consacrés aux pays asiatiques et 4 millions à la Turquie. L'annonce sera faite officiellement lors de la conférence internationale des donateurs consacrée à la lutte contre l'épidémie de grippe aviaire et humaine, qui se déroulera à Pékin les 17 et 18 janvier. Le but de cette conférence est de mobiliser et de coordonner le soutien financier des donateurs pour renforcer les moyens de faire face à la grippe aviaire et à une éventuelle pandémie aux niveaux national, régional et mondial. Les besoins sont estimés à 3 milliards d'euros sur trois ans. La conférence de Pékin rassemblera plus de 90 pays et 25 organisations, notamment l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'Organisation internationale des épizooties (OIE) et l'organisation de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Dans le prolongement de la conférence de Genève, qui s'est tenue en novembre 2005 et qui a fait le point des besoins des pays les plus touchés par la grippe aviaire afin de faciliter leur préparation en cas de pandémie de grippe humaine, la conférence de Pékin définira les modalités financières des actions à mener pour remédier aux difficultés socioéconomiques et aux problèmes vétérinaires et sanitaires dus à la grippe aviaire. Outre les contributions financières, les participants devraient approuver une « Déclaration de Pékin » qui exposera les grands principes d'un partenariat international à long terme pour lutter contre la grippe aviaire. Au plan européen, les 25 Etats membres de l'UE se sont déclarés jeudi « inquiets et anxieux » à cause de la propagation du virus de la grippe aviaire du type H5N1, un virus hautement pathogène, dans des élevages de volaille et la contamination mortelle de nombreuses personnes en Turquie. L'UE, pour le moment, concentre ses efforts sur la Turquie à qui elle apporte une assistance technique en coordination avec les autres organisations internationales (OMS, FAO, OME). Au terme d'une réunion extraordinaire, au Luxembourg, du comité de la protection sanitaire, le système de réaction précoce et les coordinateurs de la lutte contre la grippe aviaire des Etats membres de l'UE, les représentants des 25, estiment toutefois qu' « aucun changement dans la situation épidémiologique ni augmentation des risques n'est attendu à court terme ». Cette promesse de contribution ira financer prioritairement les stratégies nationales intégrées de lutte contre la grippe aviaire des pays concernés, en plus des aides éventuelles des pays membres de l'UE. Les pays concernés sont, selon Mme Benita Ferrero-Waldner, commissaire chargée des relations extérieures et de la politique de voisinage, « les pays les plus démunis en Asie, en Afrique et dans les pays partenaires de notre politique de voisinage - en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ». Louis Michel, le commissaire chargé de la coopération au développement et de l'aide humanitaire, a indiqué, pour sa part, que « la Commission européenne est disposée à aider tous les pays en développement à déjouer cette épidémie ». Le commissaire chargé de la santé et de la protection des consommateurs, Markos Kyprianou, a souligné la nécessité de « collaborer avec les pays les plus touchés par l'épidémie de grippe aviaire pour renforcer la surveillance, favoriser l'action cohérente des services vétérinaires et des services de santé publique, encourager la planification des mesures d'urgence, assurer une coordination et veiller à l'échange d'informations. C'est ainsi que nous viendrons à bout de cette épidémie de grippe aviaire et que nous l'empêcherons de se transformer en pandémie de grippe humaine d'un nouveau type, qui pourrait être dévastateur ». Par ailleurs, les représentants de 21 pays, réunis vendredi à Tokyo sous l'égide de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), ont appelé à l'accélération de la formation de spécialistes de la grippe aviaire en Asie, pour faire face à une éventuelle propagation de cette épidémie dans la région, ont rapporté des agences de presse. Dans un communiqué conjoint publié à l'issue d'une conférence de deux jours, les participants à la réunion de Tokyo ont « exhorté les pays asiatiques à renforcer leurs capacités nationales pour détecter et réagir dès les premières apparitions » de la grippe aviaire. « Des formations doivent êtres mises en place par les experts locaux et internationaux pour permettre une réaction et une contention rapide », indique le communiqué. La Turquie va recevoir 35 millions de dollars de dons et de prêts dans le cadre d'un programme patronné par la Banque mondiale pour aider les pays affectés à lutter contre la grippe aviaire, a annoncé vendredi le ministre turc de l'Agriculture, Mehdi Eker, à la presse. Quinze millions de dollars de prêts de la Banque sont complétés par 20 millions de dollars de dons provenant d'un fonds alimenté par des pays et des organisations internationales, a précisé M. Eker. « Le projet va être lancé dans les jours qui viennent, une fois les procédures administratives bouclées », a déclaré M. Eker. Son but est d'améliorer les capacités techniques et les infrastructures du pays pour combattre la maladie, qui a fait 3 morts et contaminé 15 autres personnes. Les discussions avec la Banque mondiale avaient commencé après la première irruption de grippe aviaire en Turquie en octobre, selon le ministre. La Turquie pensait à l'époque avoir réussi à éradiquer la maladie. Mais le virus mortel H5N1 a refait surface dans l'extrême est du pays, fin décembre, et s'est entre temps rapidement propagé d'est en ouest, jusqu'aux portes de l'Europe, affectant environ un tiers des 81 provinces du pays. M. Eker s'exprimait après un entretien avec l'ambassadeur américain en Turquie, Ross Wilson, qu'il a informé des derniers développements. Dans ce contexte, la France vient d'étendre le confinement des volailles domestiques de 26 à 58 départements, où se trouvent les 98 zones humides répertoriées par l'Office national des chasses capables d'accueillir des oiseaux migrateurs. Par ailleurs, les chercheurs du laboratoire de Mill Hill du National Institute for Medical Research près de Londres ont annoncé avoir découvert des mutations génétiques dans une souche du virus H5N1 retrouvées chez une des deux premières victimes de la forme humaine de la grippe aviaire dans l'est de la Turquie. Ce virus, dont le séquençage complet du génome a été effectué, est extrêmement proche du virus aviaire H5N1 qui circule actuellement chez les volailles en Turquie, et qui avait été isolé chez des oiseaux sauvages sur le lac Qing Hai au nord-ouest de la Chine l'an dernier. Les experts internationaux craignent que le virus H5N1 de la grippe aviaire échange des gènes avec celui de la grippe humaine classique, ce qui engendrerait une maladie très contagieuse, susceptible de tuer des millions de personnes dans le monde.